Monde

Quelles sont nos valeurs ?

Nous réfléchissons à la manière dont les chrétiens réagissent à l'arrivée de réfugiés dans les pays européens : sommes-nous mus par la peur ou agissons-nous en accord avec l'Évangile ?

Miguel Pérez Pichel-13 avril 2016-Temps de lecture : 3 minutes

Le rejet par les organisations sociales catholiques d'Espagne et d'autres pays européens de l'accord entre l'Union européenne et la Turquie pour le retour des réfugiés qui entrent irrégulièrement dans l'espace Schengen est un acte d'humanité et d'engagement envers les enseignements de l'Évangile. L'Église (et ses membres) ne peut pas détourner le regard lorsque des centaines de milliers de familles avec de jeunes enfants tentent de fuir la guerre, la violence, l'esclavage, la misère...

Il est vrai que des mesures doivent être prises pour que le flux de migrants ne provoque pas le chaos aux frontières. En fait, les plaintes des pays de transit (Grèce, Hongrie, Autriche...) ne portent pas sur l'ouverture de leurs portes aux personnes en fuite, mais sur le manque de coordination au sein de l'Union européenne.

En ce sens, le document rendu public par Caritas, CONFER, le Secteur social de la Compagnie de Jésus et Justice et Paix (rejoints ensuite par d'autres institutions sociales) propose des solutions. Elle propose notamment "fournir des voies d'accès sûres et légales à l'Europe". comme moyen de lutter contre les mafias ; ou "d'établir un nouveau système de répartition de la population réfugiée en Europe qui soit équitable pour les Etats et les réfugiés"..

La réponse des catholiques ne peut être que d'accueillir ceux qui fuient, ceux qui cherchent un refuge et un avenir. L'attitude de l'Europe peut être source de honte et de scandale. L'évêque de San Sebastián, José Ignacio Munilla, a été très clair : l'Europe est "trahissant leurs racines chrétiennes". en signant l'accord avec la Turquie.

N'oublions pas non plus que la guerre et l'offensive de Daesh en Syrie et en Irak n'ont pas seulement frappé les musulmans sunnites, mais ont également causé la mort et la fuite de centaines de milliers de chrétiens, de Yazidis et de chiites. Devons-nous les oublier ? L'Église aide tous les réfugiés, quelle que soit leur foi, bien sûr. Mais d'une manière particulière, elle doit venir en aide à leurs frères et sœurs dans la foi. Parmi les réfugiés qui arrivent en canots pneumatiques sur les côtes de la Grèce et qui parcourent ensuite des milliers de kilomètres à pied pour atteindre l'Allemagne, la France ou le Danemark, il y a aussi des chrétiens syriens et irakiens. Les chrétiens qui vivent dans des camps de réfugiés ou dans des centres sportifs aux côtés de leurs compatriotes musulmans. Des chrétiens qui sont souvent discriminés par les autres réfugiés et qui se sentent abandonnés dans des pays qu'ils pensaient être leurs frères et sœurs, mais qui les rejettent pourtant. L'Église est aussi avec les réfugiés chrétiens. Une Église qui, dans un acte œcuménique louable, avec les protestants et les orthodoxes, aide tous ceux qui arrivent : des églises ont été mises à disposition pour les accueillir, des centaines de bénévoles ont été mobilisés, des collectes ont été faites, une voix leur a été donnée ?

Les actions des chrétiens ne sont pas simplement un acte de charité paternaliste, le résultat de la culture "sentimentaliste" et "do-gooder" qui semble prévaloir dans certains secteurs de la société européenne. De telles attitudes sont très bien pour mobiliser la société au lendemain d'une crise humanitaire, mais elles finissent par être oubliées dès que les médias concentrent leur attention sur un autre sujet. La réponse chrétienne va plus loin. Des organisations telles que Caritas et l'Aide à l'Église en détresse aident depuis des années les réfugiés dans leurs lieux d'origine au Liban, en Syrie et en Irak. L'avancée de Daesh en Syrie et en Irak a vidé ces pays de leurs chrétiens. En Syrie, les chrétiens ont fui vers la Turquie, le Liban et les zones contrôlées par le régime de Bacher Al Assad. En Irak, ils ont trouvé refuge principalement au Kurdistan irakien et en Jordanie.

L'évêque Juan Antonio Menéndez d'Astorga, membre de la Commission épiscopale pour les migrations, a reconnu que la situation des réfugiés pose un certain nombre de défis à l'Église : "Un défi humanitaire qui implique la défense de la dignité de la vie et de la personne des réfugiés et des personnes déplacées de force, le soutien au regroupement familial et l'accueil, l'hospitalité et la solidarité avec les réfugiés. Un défi ecclésial qui s'exprime dans l'accompagnement pastoral et spirituel des catholiques de rite latin et oriental, dans le dialogue œcuménique et interreligieux. Un défi culturel qui nous engage à construire une culture de la rencontre, de la paix et de la stabilité"..

Espérons que nous, citoyens européens, parviendrons également à relever ces défis afin d'empêcher l'Europe de trahir ses valeurs chrétiennes traditionnelles et de cesser d'être l'Europe.

L'auteurMiguel Pérez Pichel

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