CollaborateursSantiago Leyra Curiá

Trois philosophes modernes et l'existence de Dieu

Dans cet article, nous examinons les réflexions sur l'existence de Dieu de trois philosophes : Nicolas de Cusa, Descartes et Pascal.

11 janvier 2024-Temps de lecture : 5 minutes

Nicolas de Cusa

Nicolas de Cusa est né dans la ville allemande de Cusa (Kues), en 1401 et mort en 1464. Son principal ouvrage et chef-d'œuvre est "De docta ignorantia".. Selon lui, il y a plusieurs façons de connaître : premièrement, par les sens, qui ne nous donnent pas une vérité suffisante, mais seulement par le biais d'images ou de sensations. Deuxièmement, par la raison ou l'entendement, qui comprend de manière abstraite et fragmentaire ces images ou ces sensations dans leur diversité. Troisièmement, par l'intelligence qui, aidée par la grâce surnaturelle, nous conduit à la vérité de Dieu. Cette vérité nous fait réaliser que l'Être infini est impénétrable ; nous comprenons alors notre ignorance de l'Être infini ; c'est à cela que nous conduit la vraie philosophie, à la "l'ignorance apprise"La plus haute connaissance consiste en ceci.

Ami du pape Eugène IV, le pape de l'union chrétienne, il a fait partie de la délégation papale qui a accompagné l'empereur Jean VIII et le patriarche Joseph dans leur voyage de Constantinople en Italie, qui a abouti au retour et à l'union de l'Église orthodoxe grecque à l'Église catholique romaine.

Lors du voyage de retour de sa mission à Constantinople, il fait en haute mer une expérience décisive pour sa conception philosophique : l'horizon de la mer semble s'étendre comme une ligne droite, alors que ce que l'on voit fait partie d'un cercle à très grand rayon en raison de la forme sphérique de la Terre. Cette expérience a influencé le contenu de son œuvre "De docta ignorantia" : nous savons que notre finitude ne peut jamais atteindre la vérité dans toute sa plénitude et sa précision ; et plus nous sommes conscients de notre ignorance, plus elle devient une ignorance savante, une sagesse philosophique ; cette sagesse part du doute, mais présuppose l'existence de la vérité, qui ne peut être fondée que sur une intelligence infinie, éternelle et créatrice.

L'union des Églises a été proclamée le 6-7-1439 dans l'église de Santa Maria dei Fiori à Florence. Mais l'union échoue peu de temps après. Le métropolite Isidore de Kiev proclame l'union à son arrivée à Moscou, mais il est rapidement arrêté par le prince Vassili, qui interdit à l'Église russe d'accepter toute union avec les Latins.

Dans l'Empire byzantin, les évêques grecs, à leur retour de Florence, se heurtent à un climat populaire défavorable ; bien que l'union ait été promulguée dans la cathédrale Sainte-Sophie le 12-12-1452, en présence de l'empereur Constantin XI, du légat du pape et du patriarche byzantin, un violent tumulte éclate de la part du clergé et des moines qui poussent le cri, appuyé par la masse : "Que le turban des Turcs règne sur Constantinople plutôt que la mitre des Latins" : " Que le turban des Turcs règne sur Constantinople plutôt que la mitre des Latins !".

Une demi-année plus tard, ce cri allait connaître son triste aboutissement : le 29-5-1453, la capitale tombait aux mains des Turcs, le dernier empereur de l'Empire d'Orient mourait au combat et l'Empire byzantin mettait fin à ses jours. À Rome, Isidore de Kiev, fuyant la Russie, et Bessarion de Nicée, qui devinrent deux cardinaux de l'Église universelle, furent pendant des années comme le souvenir vivant de quelque chose qui aurait pu être, mais qui n'a pas été parce que les hommes n'ont pas voulu qu'il soit. Méditant sur la chute de Constantinople, Nicolas de Cuse a conçu sa vision grandiose d'une future conciliation universelle, dans son œuvre "De pace fidei". (Sur la paix de la foi), achevé avant le 14-1-1454.

Suivant le pape Pie II sur la côte adriatique, où la flotte de la croisade chrétienne contre l'invasion turque avait rendez-vous, Nicolas subit la dernière attaque d'une maladie chronique et mourut à Todi (Ombrie) le 11-8-1464. Trois jours plus tard, son ami Aeneas Silvius, le pape Pie II, mourut à Ancône. La dépouille de Nicolas de Cuse est transférée à Rome et enterrée dans l'église du cardinal titulaire, Saint-Pierre in Vinculis. Son cœur repose à Kues (Cusa), à environ 50 km au nord-est de Trèves, dans l'une de ses fondations, l'hôpital Saint-Nicolas, qui accueille depuis plus de cinq siècles les pauvres et les malades, et où sont conservés de précieux manuscrits classiques, patristiques et médiévaux que Nicolas avait rassemblés lors de ses voyages en Orient et en Occident.

René Descartes, originaire de La Haye (Touraine, France), est né en 1596 et mort en 1650. Il fait ses études chez les Jésuites de La Flèche. En 1640, il se rend à Paris, où il est totalement sceptique. Afin de voir le monde, il embrasse la vie militaire en Hollande, où il vit à partir de 1629. À partir de 1649, il réside à Stockholm à l'invitation de la reine Christine, dont la conversion au catholicisme a été influencée par ses conversations avec Descartes lui-même, qui s'était converti auparavant.

Il pense que la pensée ne mérite pas qu'on lui fasse confiance, car elle tombe souvent dans l'erreur. D'autre part, les mathématiques et la logique ne sont pas des sciences qui servent à connaître la réalité. Et il n'admet pas dans sa philosophie une seule vérité qui puisse être mise en doute. Il n'y a rien de certain que moi, et je ne suis rien d'autre qu'une chose qui pense. C'est la première vérité indubitable, évidente : le "cogito, ergo sum".

Mais, plus loin, Descartes dit : "Je trouve dans mon esprit l'idée de Dieu, d'une entité très parfaite, infinie, omnipotente, qui sait tout. Cette idée ne peut venir du néant, ni de moi-même, qui suis imparfait, fini, faible, plein d'ignorance, car alors l'effet serait supérieur à la cause, ce qui est impossible. Par conséquent, le idée L'idée de Dieu doit avoir été placée en moi par une entité supérieure qui atteint la perfection de cette idée, c'est-à-dire par Dieu lui-même.

Né en 1623 à Clermont-Ferrand, dans une famille de juristes et de financiers, Blaise Pascal reçoit une éducation humaniste et scientifique. En 1647, à Paris, il fait la connaissance de la philosophie de Descartes et de Descartes lui-même, dont il s'éloigne et qu'il critique sévèrement.

Le 23 novembre 1654, il subit un choc profond qui transforme radicalement sa vie et qu'il consigne dans son écrit, le "Mémorial".. Dans cet écrit, il décrit sa rencontre avec le Dieu vivant, "le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, et non le Dieu des sages et des philosophes : le Dieu de Jésus-Christ". Il conçoit le projet d'écrire une vaste apologie du christianisme et commence à prendre des notes, qui seront publiées, après sa mort prématurée, le 19 août 1662, sous le titre "Pensées"..

A l'incrédulité des "libertins érudits" et à la raison froide et sûre d'elle-même, à la manière de Descartes - que Pascal appelle la "raison de l'homme" - s'oppose l'incrédulité. "l'esprit de géométrie", s'oppose à un "esprit de finesse", ouvert à l'ensemble, noble et dramatique, de l'expérience humaine. Cet esprit inclut le cœur, car "le cœur a des raisons que la raison ne comprend pas"..

Se savoir misérable et avoir besoin d'être régénéré est le premier pas sur le chemin qui mène à la récupération de sa propre grandeur originelle. La sagesse pascalienne est donc ordonnée à la conversion. L'un des ennemis de cette conversion est le divertimento, la superficialité existentielle, la fuite du réel en se livrant à des divertissements qui tentent d'éviter toute confrontation avec l'essentiel ; un autre ennemi est l'autosuffisance du moi qui s'enferme dans un raisonnement froid et géométrique qui noie le cœur.

Pour Pascal, Dieu est un Être en partie caché et en partie manifeste : il est suffisamment manifeste pour que nous puissions constater sa réalité ; mais il est également caché, de sorte que s'approcher de lui implique foi, abandon et mérite. Dieu se révèle à nous en Jésus-Christ comme le Dieu vivant, un Dieu dont on s'approche par une foi et un amour qui, partant de la reconnaissance du péché, s'ouvrent à la confiance en sa miséricorde.

L'auteurSantiago Leyra Curiá

Membre correspondant de l'Académie Royale de Jurisprudence et de Législation d'Espagne.

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