Corps et âme

Aujourd'hui, 15 août, nous célébrons l'Assomption de la Vierge Marie, c'est-à-dire que Marie a été enlevée au ciel, corps et âme, et que son corps est donc déjà glorifié, comme un avant-goût de ce qui arrivera à tous les sauvés à la fin des temps.

15 août 2023-Temps de lecture : 3 minutes

Le 15 août, nous célébrons le Asunción C'est l'une des fêtes chrétiennes les plus populaires, mais elle repose sur l'un des articles les plus impopulaires de notre credo, celui de la "résurrection de la chair" : combien peu y croient !

Il serait curieux de se rendre dans l'une de ces avenues commerçantes bondées où les journalistes effectuent les enquêtes de rue habituelles et d'interroger les gens sur leurs croyances en la vie après la mort. Beaucoup le nieraient ; beaucoup d'autres affirmeraient sans équivoque qu'ils croient à la réincarnation ou à la fusion avec une énergie cosmique ambiguë ; à la rigueur, certains oseraient parler d'un paradis éthéré avec de petits nuages et des anges ?Mais peu, très peu, affirmeraient catégoriquement qu'ils croient - comme l'affirme l'Eglise - que leur corps, leur propre corps (mains, pieds, dents, foie, estomac...), ressuscitera transfiguré à la fin des temps pour la vie éternelle. Pensez-vous que l'échantillon serait très différent si nous faisions le sondage à la porte d'une église paroissiale après la messe ? J'en doute.

Le dogme de l'Assomption de Marie, dont nous faisons coïncider la fête à la mi-août avec d'innombrables invocations mariales locales, proclame que la Vierge, comme son Fils, est ressuscitée en corps et en âme et vit déjà éternellement avec Lui. Le destin de Marie est le même que celui qui nous attend. C'est ce que Jésus nous a promis. Son seul privilège est d'avoir anticipé le moment. Elle n'a pas eu à attendre, comme nous, la fin des temps. Un traitement VIP pour une femme vraiment VIP, qui n'est autre que la mère de Dieu.

Mais pourquoi avons-nous tant de mal à y croire ? Pardonnez-moi d'insister, mais le sujet me semble très important car il touche au fondement du christianisme : le tombeau vide. Si le Christ n'est pas ressuscité, à quoi sert la foi ?

Je pense que l'une des raisons de cette incrédulité est qu'elle est tout à fait contre-intuitive. Lorsque quelqu'un meurt, nous voyons comment son corps est corrompu. Même si nous lisons les anciennes écritures, les témoignages des premiers chrétiens et que nous disons que nous attendons la résurrection, nous ne savons pas vraiment à quoi elle ressemblera parce que la matière disparaît dans notre dimension temporelle. Les idées platoniciennes qui imprègnent notre culture, et le christianisme avec elle, sont beaucoup plus intuitives.

La division classique entre le corps mortel et l'âme immortelle nous fait retomber sans cesse dans une doctrine, la doctrine dualiste, qui est contraire à ce que la communauté chrétienne a cru historiquement et croit aujourd'hui. Nous retombons aussi parfois sur des idées manichéennes (également contraires au dépôt de notre foi) comme celles qui ont séduit saint Augustin et qu'il a tant regrettées, dans lesquelles le corps est considéré comme l'origine du mal tandis que l'esprit est l'origine du bien.

Ces deux doctrines sont à la base de nombreuses colonisations idéologiques que le pape François a une fois de plus dénoncées dans le rapport de la Commission européenne. JMJ et qui imprègnent aujourd'hui la pensée de la majorité des gens. Les jeunes générations, par exemple, considèrent qu'il est normal de céder son corps lors d'une soirée à un inconnu avec lequel on ne partage même pas son numéro de téléphone, parce que le corps n'est, après tout, qu'une matière qui sera mangée par la terre. Pour moi, c'est une autre réalité.

D'autre part, il y a de plus en plus de personnes qui rejettent leur corps parce qu'elles le considèrent comme la source du mal qui les affecte. Certains ne sont pas d'accord avec leur sexe, d'autres avec leur silhouette ou leur visage. Ils se voient comme des âmes pures (qui n'ont pas droit à l'erreur) enfermées dans un (mauvais) corps et sont prêts à le mutiler ou à lui imposer la forme ou l'usage qu'ils croient parfaits. Il y a aussi ceux qui demandent que leurs cendres soient dispersées dans tel ou tel endroit idyllique, comme une façon de cesser d'être eux-mêmes et de rejoindre un univers impersonnel.

Contrairement à ces formes de dualisme, au manichéisme ou au matérialisme pratique, l'Église affirme que l'être humain est à la fois un être corporel et un être spirituel. Le corps et l'âme sont dignes. D'où le respect séculaire de son propre corps et de celui de son prochain, même après la mort. Car la chair n'est pas une sorte d'enveloppe ou de coquille jetable, mais elle est elle-même l'être humain, l'œuvre parfaite du créateur, le temple de l'Esprit Saint.

Glorifiez Dieu par votre corps", demandait saint Paul aux Corinthiens. C'est ce dont Marie a été la pionnière, en mettant sa chair, toute sa vie, au service de Dieu et de l'humanité. Et c'est pourquoi nous commémorons le fait que sa chair est désormais immortelle. Un conseil pour célébrer cette fête : regardez-vous dans le miroir, contemplez chaque détail (qu'il vous plaise ou non), en pensant, comme Marie, que si Dieu l'a voulu ainsi : "Voici la servante du Seigneur". Regardez vos mains, portez-les à votre bouche et embrassez-les : elles vous accompagneront dans l'éternité. Et glorifiez Dieu avec elles : joignez-les pour prier, tendez-les pour embrasser ceux qui ont besoin d'affection ou de réconfort, levez-les pour aider ceux qui en ont besoin, frappez-les pour applaudir Marie dans son assomption au ciel. Elle nous attend (ici et là), corps et âme.

L'auteurAntonio Moreno

Journaliste. Diplômé en sciences de la communication et licencié en sciences religieuses. Il travaille dans la délégation diocésaine des médias à Malaga. Ses nombreux "fils" sur Twitter sur la foi et la vie quotidienne sont très populaires.

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