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Chercher, se souvenir... La valeur du silence

Comparé à une telle richesse, le silence peut être jugé dérisoire et appauvri. Mais une telle simplification serait une erreur. Les mots et le silence s'imposent l'un à l'autre ; le silence individualise les mots et leur donne de la vigueur.

Omnes-2 février 2018-Temps de lecture : 12 minutes

Les progrès incalculables de la communication entre les hommes ont été rendus possibles par la parole, d'abord verbale, puis écrite. Le silence est également d'une valeur incalculable dans la communication.

Les mots et le silence

Il semble miraculeux de pouvoir saisir en quelques phonèmes ou graphèmes, avec leurs diverses combinaisons, l'expressivité intérieure presque illimitée de la personne humaine.

Comparé à une telle richesse, le silence peut être jugé dérisoire et appauvri. Mais une telle simplification serait une erreur. Les mots et le silence s'imposent l'un à l'autre ; le silence individualise les mots et leur donne de la vigueur. Le silence souligne les mots et les mots donnent un sens aux silences.

D'innombrables livres, remplis de mots, ont été écrits pour en rendre compte. Beaucoup moins ont été écrits pour parler du silence. Ces derniers temps, cependant, la nécessité de souligner l'importance et le rôle du silence s'est généralisée.

On peut dire qu'il y a autant de variété dans les silences que dans les mots. Tous les silences ne signifient pas la même chose ou ne véhiculent pas la même chose ; ils sont même parfois diamétralement opposés. Pour beaucoup "Le silence est simplement l'absence de bruit et de mots ; mais la réalité est bien plus complexe". (Robert Sarah, Le pouvoir du silenceMadrid 2017, p. 220).

Un couple marié, peut-être jeune, dînant seul et en silence, peut signifier une communion d'amour et de sentiments si grande qu'elle n'a pas besoin de fausses explications. C'est généralement à ça que ressemble le silence amoureux. Mais il peut aussi arriver que les conjoints soient incapables de se parler en raison de graves divergences antérieures. Ce serait un silence de rejet. Le premier message est celui de l'amour, le second celui de la mort de l'amour lui-même (cf. ibid.).

Le silence est pluriforme. C'est pourquoi il est important de préciser que notre intérêt n'est pas le silence pour le silence. Contrairement à de nombreux mots qui, en eux-mêmes, signifient quelque chose, le silence seul est muet. Ce que le silence cache, derrière lui, c'est ce qui le cautionne. Le silence d'un étudiant ignorant face à un examen est très différent du silence d'un moine en prière ou d'un scientifique réfléchi.

Nous nous concentrerons ici sur les silences significatifs : capables d'enrichir l'esprit humain dans sa relation avec Dieu et les hommes.

Dialogue et monologue

La communication humaine nécessite dialogueL'échange d'idées et d'arguments. Et c'est là qu'intervient l'un des services les plus puissants du silence : tout véritable dialogue comprend... savoir écouter. C'est le seul moyen de progresser vers la vérité.

Certes, il existe des dialogues qui ne cherchent pas la vérité, mais seulement l'intérêt ; Platon a dû se battre avec les sophistes de l'époque, il y a vingt-cinq siècles. Mais, même pour eux, le silence nous permet d'écouter et de réfléchir, en détectant les bonnes ou mauvaises choses.

Nous incluons dans la catégorie du dialogue non seulement le dialogue verbal, mais aussi le dialogue écrit. Grâce à ses livres, il nous est possible de dialoguer avec les penseurs qui nous ont précédés. Il semblerait que dans ce dialogue avec le passé, il soit plus facile de se taire, mais ce n'est pas le cas. Pour citer un exemple : combien de personnes entendent la parole de Dieu dans la liturgie du dimanche et l'oublient immédiatement parce qu'elles ne la comprennent pas. écouter...Le silence, capable d'accueillir la Parole et son message, a fait défaut.

Le grand ennemi du dialogue et du silence est le monologue. Une attitude qui retourne sans cesse quelques idées dans son esprit, rendant sa compréhension imperméable à l'écoute des autres.

Lorsque nous parlons de la prière comme d'un dialogue avec Dieu, nous pouvons mieux comprendre le problème du monologue intérieur qui sature l'esprit de tant de personnes : les doutes, les rancœurs, l'envie, la susceptibilité ; ou encore les rêveries vides, l'imagination livrée à elle-même, les projets utopiques, tout cela fait partie de ce monologue intérieur, qui se termine soit par le découragement et l'amertume, soit par une perte de temps et d'énergie. Ainsi, saint Josémaria Escriva écrit dans Camino: "Que le silence est fécond ! -Toutes les énergies que tu gaspilles sur moi, avec ton manque de discrétion, sont des énergies que tu soustrais à l'efficacité de ton travail". (n. 645).

Silence et sensibilité

Dans le dialogue humain, le silence est souvent le seul comportement approprié. Que ce soit en raison de la solennité d'un acte, de l'intensité d'un chagrin, ou par délicatesse avec notre entourage : se taire dans de telles circonstances est le meilleur dialogue possible. Parler peut être inopportun, indiscret ou inconsidéré. De même, le silence face aux éventuelles fautes des autres - présents ou absents - est le meilleur signe de charité et de respect. Ceux qui ne pensent qu'à eux-mêmes ne mesurent pas l'impact de leurs paroles.

Retour aux amoureux, pour eux le présence est bien plus importante que les mots. "Ceux qui sont amoureux pétrissent silence sur silence pour jouir de ce qui ne peut être dit, car les mots sont courts". (Miguel-Ángel Martí García, SilenceEIUNSA, Madrid 2005, p. 47). Face aux sentiments en jeu, les mots sont superficiels. Et c'est précisément ce silence qui leur permet de deviner les désirs et les intentions de l'être aimé (cf. ibid., p. 48).

De la même manière, tout regard profond appelle le silence. Un dicton populaire bien connu s'exclame : "Tais-toi, je ne vois rien !"Et ce n'est pas une question simple. Il n'est pas possible de regarder profondément, d'intérioriser ce que l'on voit et d'y reposer l'âme, si l'esprit, le corps ou l'environnement qui nous entoure sont altérés, stridents, dépourvus de calme et de paix.

Un tel regard est toujours méticuleux, il valorise les détails, découvre une nouvelle lumière dans les choses habituelles, parfois même il ferme les yeux pour "chérir" ce qu'il voit ; et rien de tout cela n'est possible dans la précipitation ou en partageant son attention avec des choses insignifiantes. C'est-à-dire sans silence intérieur.

La quête intérieure

Le site silence intérieur -ce qui dépend de la tranquillité du cœur, et non de l'extérieur, n'est pas facile à réaliser. Tout d'abord, parce que "L'une des limites d'une société si conditionnée par la technologie et les médias est que le silence devient de plus en plus difficile.comme l'observe saint Jean Paul II (lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae, 31).

Mais aussi parce que nous nous enivrons facilement nous-mêmes de mots, de musique et de bruits multiples. Le site philosophie de la distraction a envahi le comportement de masses entières d'hommes, les empêchant de penser par eux-mêmes.

Il est courant d'entretenir de longs monologues répétitifs, comme nous l'avons souligné précédemment, et nous devons apprendre à les détecter et à les interrompre. D'où la recommandation de saint Josémaria Escriva : "'J'ai des choses qui bouillonnent dans ma tête aux moments les plus inopportuns...', dites-vous. C'est pourquoi je vous ai recommandé d'essayer d'atteindre des moments de silence intérieur". (Sillon, n. 670). Elle est parfois coûteuse, mais son fruit immédiat est une fraîcheur d'esprit et une santé mentale enviables ; et, lorsqu'elle arrive à maturité, ce temps devient éventuellement silence créatif (cfr. Miguel-Ángel Martí García, o.c., p. 51).

Le silence intérieur est le seuil de la rencontre avec nous-mêmes, une condition indispensable à la rencontre avec Dieu. Mais, avant cela, la contemplation de l'art, la connaissance approfondie des gens, la jouissance des petites joies de la vie, exigent de chacun la mortification du monologue intérieur. Le silence avec son propre moi rend possible une rencontre avec le monde et avec les gens sans préoccupations "utilitaires". Une telle rencontre devient alors une jouissance généreuse et désintéressée des personnes et des biens que Dieu a mis à notre disposition dans le monde.

a) Connaissances propres

La conséquence la plus remarquable du silence intérieur est la connaissance elle-même. Une question difficile en effet. "Te connaissant et me connaissantSaint Augustin a demandé à Dieu ; et ce n'est pas une petite sagesse.

La vie humaine est pleine d'incidents constants : matériels, professionnels, émotionnels, de santé, etc. Notre esprit est entraîné par elles, de sorte qu'il passe de l'une à l'autre, sans avoir le temps de développer une vision globale qui les rassemble et les harmonise. Le silence est nécessaire pour prendre de la distance par rapport aux problèmes et éviter d'être submergé par leurs urgences et leurs pressions. Un repos adéquat, au milieu de ces multiples tâches, est essentiel pour trouver l'harmonie souhaitée. Le repos physique et le silence intérieur favorisent l'analyse sereine de son propre comportement, qui nous permettra de mieux nous connaître : points faibles du caractère, qualités positives et défauts acquis, habitudes incorrectes et imperfections accumulées.

Accompagnée de la confiance en Dieu, cette analyse ne provoquera ni découragement ni euphorie. Elle nous permettra d'objectiver notre conduite, de reconnaître nos défauts et de procéder à leur correction avec patience et temps. Un examen de conscience régulier, sans drame ni euphémisme, est le fruit et le moteur du silence intérieur recherché.

b) La sagesse

Le silence intérieur favorise la connaissance de soi. Le silence extérieur facilite l'étude et la lecture, suivies d'une réflexion personnelle. Le résultat est un sagesseau sens classique du terme. Une manière harmonieuse de comprendre le monde et l'existence, qui sait mettre chaque pièce à sa place : Dieu, les autres et moi-même. Une connaissance de bon goût, qui est recréé dans les réalités matérielles et spirituelles.

La sagesse nous permet d'intérioriser les événements extérieurs et d'équilibrer les sentiments intérieurs, de sorte que la vie progresse vers sa fin sans heurts, ou avec le moins d'heurts possible. Il crée un espace intérieur de calme, qui accueillera les conflits, leur donnera un repos approprié, et trouvera la solution la plus favorable. Ce sera la sagesse d'un silence non perturbé par le vacarme des bruits assourdissants du monde. Saint Jean Paul II écrit dans Pastores dabo vobis, 47: "Dans l'agitation de notre société, un élément pédagogique nécessaire à la prière est l'éducation au sens humain profond et à la valeur religieuse du silence, comme atmosphère spirituelle indispensable pour percevoir la présence de Dieu et se laisser conquérir par elle..

c) La projection de l'existence

En aucun cas, le silence intérieur et la sagesse à laquelle il mène ne conduisent à l'égocentrisme intellectuel ou au narcissisme. Ce qui a été dit sur l'harmonie inclut Dieu et le prochain en tant qu'objets d'amour et destinataires de ce qui est le mieux pour eux.

Par conséquent, un bon silence n'est jamais un isolement. Le processus d'intériorisation ne vise pas à une attitude d'évasion, mais à nous donner une évaluation intelligente, objective et équilibrée de ce qui nous arrive et de ce que nous sommes ; précisément pour vivre ensemble avec les autres, en les respectant en tant que personnes et en défendant leur liberté ainsi que la nôtre.

En parlant de la vie spirituelle, le pape François et d'autres papes récents ont insisté pour éviter la vie spirituelle. faux spiritisme d'une vie de piété fermée sur elle-même, incapable de se transcender pour aller à la rencontre des besoins des autres.

Silence et vie spirituelle

Le site silence intérieur est comme la baguette du chef d'orchestre, qui fait intervenir chaque instrument au bon moment, en tempérant les plus énergiques et en encourageant les plus délicats, afin que la concertL'intention du compositeur est de créer un morceau unique et harmonieux qui répond aux sentiments que le compositeur a voulu transmettre.

Dans l'existence personnelle, les "instruments" à diriger sont les ingrédients pluriels, et souvent discordants, de la personnalité : le tempérament, le caractère, les circonstances, les événements. Malgré cette multiplicité, l'esprit humain possède une dimension transcendante qui lui permet de s'occuper des nombreuses questions concrètes, sans se dissocier de la finalité ultime à laquelle il est appelé par son Créateur. Mais pour ce faire, le silence intérieur doit adresse le "concert" de l'existence humaine.

a) Nécessaire pour chercher Dieu

La vie spirituelle chrétienne se développe dans la relation avec Dieu et dans le dialogue avec Lui. Mais Dieu est le ineffablement AutreIl n'y a pas de mots humains pour le décrire ; l'attitude la plus appropriée de l'homme devant Dieu devrait être le silence : indecibilia Dei, casto silentiodit Saint Thomas d'Aquin : "Devant l'ineffable de Dieu, gardons un silence mesuré"..

C'est peut-être cette conscience implicite de l'ineffable qui a accumulé, dans l'histoire de l'Église, tant de mouvements - individuels ou institutionnels - à la recherche du silence. Depuis les premiers ermites jusqu'aux grandes abbayes chartreuses, ils montrent que "En nous, le silence est ce langage sans mots de l'être fini qui, par son propre poids, attire et entraîne notre mouvement vers l'Être infini". (Joseph Rassam, Le silence comme introduction à la métaphysiquecit. dans Robert Sarah, Le pouvoir du silenceMadrid 2017, prologue).

Il est évident que le tumulte du monde, l'agitation des affaires séculaires, l'urgence des solutions, les explosions festives et ludiques, et bien d'autres manifestations humaines, brisent notre silence intérieur, le remplissant de précipitation, d'inconscience ou de sentiments non pacifiques. Nombreux sont ceux qui ne réalisent pas à quel point ils vivent souvent immergés dans le bruit. Si nous transportons notre téléphone portable ou une radio dans notre poche, avec le son activé, nous ne le remarquerons probablement pas au milieu d'une rue animée par la circulation. Mais si nous entrons avec lui dans un endroit calme - un cinéma, une église - notre négligence sera immédiatement remarquée et nous essaierons d'éteindre l'appareil.

De même, il y a ceux qui vivent constamment avec celui-là monologue intérieur qui a déjà été mentionné, mais il ne s'en rend pas compte parce qu'il vit vers l'extérieur, pour l'extérieur bruyant.

Et la mauvaise nouvelle est qu'il n'existe pas d'interrupteur pour "éteindre" le bavardage de notre imagination.

(b) Silence et détachement du monde

Pour faire taire le bruit intérieur, l'une des méthodes traditionnelles consiste à se retirer du monde, à rechercher la solitude et l'isolement.

Les fruits de cet effort peuvent être exceptionnels. Un connaisseur des monastères contemplatifs écrit : "Le silence est difficile, mais il rend l'homme capable de se laisser guider par Dieu... L'homme ne cesse d'être surpris par la lumière qui jaillit alors. Le silence... révèle Dieu. La véritable révolution vient du silence : il nous conduit à Dieu et aux autres pour nous mettre humblement et généreusement à leur service". (ibid., n. 68, p. 60).

Ceux qui ressentent ce besoin, non seulement de silence, mais aussi d'isolement pour se détacher des affaires du monde et se consacrer entièrement au service de la prière, peuvent trouver dans la vocation religieuse contemplative le chemin de leur vie.

Mais il faut noter que "Le silence qui règne dans un monastère ne suffit pas. Pour atteindre la communion [avec Dieu] dans le silence, nous devons travailler indéfiniment. Nous devons nous armer de patience et y consacrer des efforts ardus". (ibid., p. 231). Une vie entière de détachement du monde ne garantit pas des résultats fructueux, principalement parce que ceux-ci sont le don de Dieu, et non la conséquence des efforts humains.

c) Souvenir intérieur

La grande majorité des fidèles chrétiens ne passeront jamais par un monastère ou ne s'enfermeront pas dans le silence. Sont-ils privés de l'accès à Dieu dans leur prière ? Absolument pas. Mais alors, le silence, sujet de ces pages, est-il inutile dans leur cas ?

C'est également nécessaire. Sans silence intérieur, il n'y a pas de prière possible, et sans prière - en tant que voie ordinaire - nous ne parvenons pas à la connaissance et à l'amitié de Dieu.

La solution peut sembler être un tour de passe-passe : il suffit de changer le nom. Si au lieu de silence, nous l'appelons souvenirNous pouvons appliquer aux chrétiens vivant au milieu du monde des règles analogues - mais non identiques - au silence monastique. Mais il ne s'agit pas d'une manipulation du langage ; elle consiste à donner un nom à deux réalités qui ont la même racine, mais qui sont caractérisées, dans chaque cas, par des circonstances différentes.

Dans ses écrits et dans sa prédication aux fidèles laïcs, saint Josémaria Escriva fait de nombreuses références à ce silence intérieur : "Le silence est comme le gardien de la vie intérieure". (Camino, n. 281) ; "Essayez d'obtenir chaque jour quelques minutes de cette solitude bénie qui est si nécessaire pour faire avancer la vie intérieure". (ibid., n. 304).

Dans le même temps, il s'est toujours efforcé de ne pas séparer "Les enfants de Dieu doivent être des contemplatifs : des personnes qui, au milieu du bruit de la foule, savent trouver le silence de l'âme dans un colloque permanent avec le Seigneur : et le regarder comme on regarde un Père, comme on regarde un Ami, qu'on aime avec folie". (Forge, n. 738).

Ce silence de l'âme est ce que, à d'autres moments, il identifie avec le souvenir: "La vraie prière, celle qui absorbe l'individu tout entier, n'est pas tant favorisée par la solitude du désert que par le recueillement intérieur". (Sillon, n. 460). Et pour en souligner l'importance, il écrit : "Ce recueillement intérieur qui est le signe de la maturité chrétienne". (C'est le Christ qui passe, n. 101).

Une maturité qui se traduit par le fait que "Nous participerons à la joie de l'amitié divine - dans un recueillement intérieur, compatible avec nos devoirs professionnels et ceux de la citoyenneté - et nous le remercierons [Jésus-Christ] pour la délicatesse et la clarté avec lesquelles il nous apprend à accomplir la volonté de notre Père qui habite dans les cieux". (Les amis de Dieu, n. 300).

Un recueillement qui, comme nous l'avons indiqué pour le silence monastique, implique de nombreuses années d'efforts humains qui, avec la grâce de Dieu, aboutiront à : parcourir la vie en amitié avec Dieu.

d) Le silence et la prière vocale

De manière assez surprenante, la prière vocale a besoin de silence tout autant que la prière mentale. En d'autres termes, l'ennemi de la prière est le même dans les deux cas : ce monologue intérieur dont nous parlons et qui envahit notre esprit, alors même que notre bouche prononce des mots auxquels nous ne prêtons pas attention.

Dans la prière vocale, bien sûr, il y aura toujours des mots ; mais il doit s'agir de mots qui viennent à la bouche de l'intérieur du cœur, et c'est précisément le cœur qui a besoin du recueillement et du silence dont nous parlons.

À titre d'exemple, parmi tant d'autres, nous pouvons citer ce que saint Jean-Paul II a suggéré en parlant du Rosaire : "L'écoute et la méditation se nourrissent du silence. Il est bon que, après l'énonciation du mystère et la proclamation de la Parole, nous attendions quelques instants avant de commencer la prière vocale, afin de fixer notre attention sur le mystère médité. Redécouvrir la valeur du silence est l'un des secrets de la pratique de la contemplation et de la méditation. De même que dans la liturgie il est recommandé de prévoir des moments de silence, dans la récitation du Rosaire il convient également de faire une brève pause après avoir écouté la Parole de Dieu, en concentrant l'esprit sur le contenu d'un mystère particulier". (Rosarium Virginis Mariae, 31).

e) L'inspiration mariale

L'exemple de notre sainte Mère Marie est extraordinairement lumineux. Sa sainteté a été exaltée, mais sa vie s'est déroulée dans les circonstances ordinaires du monde de l'époque. Et là, "Il gardait toutes ces choses dans son coeur". (Lc 2, 51). Il vivait pour la mission que Dieu lui avait confiée, et il ne s'en laissait pas distraire par les événements quotidiens. Au milieu de ses tâches, il a maintenu un silence intérieur qui lui a permis de vivre à l'écoute de Dieu et de son fils : jusqu'à la croix.

Journées de retraite spirituelle

Les moyens pratiques de rechercher et de défendre le silence intérieur dont nous avons tous besoin sont très variés. Entre autres, la pratique chrétienne traditionnelle de retraite spirituelle de plusieurs jours. Elle peut porter différents noms - exercices spirituels, cours, etc. - mais sa signification est claire : faire une pause dans les tâches habituelles afin de concentrer le regard de l'âme sur Dieu et sur elle-même. Il se peut que ce ne soit que pour quelques jours, car les obligations habituelles ne permettent généralement pas de faire plus. Mais ces quelques jours, s'ils sont utilisés avec intensité, apporteront de grands bénéfices à notre âme.

Le principal ingrédient de la retraite et catalyseur de ces bienfaits est le silence - également extérieur - qui doit les accompagner. Ce silence facilite l'écoute de la Parole que l'Esprit Saint nous adresse. Une Parole toujours lumineuse, à la lumière de laquelle il nous sera facile de détecter les déviations présentes dans nos vies. Confiant, en outre, que ces lumières sont accompagnées de la grâce de Dieu pour rendre fructueux nos efforts pour progresser dans la sainteté.

Bien sûr, trois jours de retraite - un week-end - ne suffisent pas pour une conversion que l'on pourrait qualifier de définitive. Nous aurons encore besoin d'autres conversions à l'avenir, jusqu'à ce que Dieu nous appelle dans sa présence. C'est pourquoi il est très utile de répéter de temps en temps ces journées de recueillement ; si nous le faisons chaque année, nous verrons que cette continuité nous permet de faire des pas, peut-être petits mais répétés, qui nous rapprochent de Dieu d'une manière nouvelle. Ainsi, nous renforcerons nos bonnes dispositions, nous comprendrons de mieux en mieux les plans de Dieu pour nos vies, et nous apprendrons à suivre fidèlement les inspirations divines qui nous conduisent à Lui.

En outre, notre charité envers nos voisins nous fera prendre conscience que de nombreuses personnes autour de nous ont également besoin d'une retraite spirituelle, même si elles n'en ont pas conscience. Les aider à prendre une décision, et peut-être les accompagner dans cette démarche, n'est pas une mince faveur dont ils nous seront toujours reconnaissants.

La retraite sera l'occasion de faire une confession plus profonde que d'habitude, de recevoir la communion de manière plus fructueuse et de remplir notre esprit de la paix de Dieu, que nous déverserons ensuite sur ceux avec qui nous vivons afin de rendre leur quotidien plus agréable.

Nous apprendrons ou améliorerons aussi notre manière de prier, et nous renforcerons ce recueillement intérieur qui, en l'absence de silence extérieur, nous permet d'élever fréquemment notre cœur vers Dieu et de rester en sa présence, au milieu des tâches habituelles. n

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