Traduction de l'article en anglais
Après avoir prié le Regina Coeli le 22 mai, le pape François a prié pour les catholiques de Chine, les recommandant à Marie Auxiliatrice, qui est vénérée le 24 mai et en particulier au sanctuaire de Sheshan. Ce n'est pas la première fois que le pape évoque cet anniversaire. Et il ne pouvait en être autrement : Benoît XVI avait établi le 24 mai comme journée de prière pour la Chine dans sa lettre de 2007 aux catholiques de Chine, et c'est donc un anniversaire fixe depuis 15 ans.
Toutefois, les paroles du pape François s'inscrivent dans un contexte plus dramatique. Il est vrai que depuis 2008, première année de la tenue de la prière, les missionnaires n'ont cessé de dénoncer les obstacles posés par Pékin au pèlerinage au sanctuaire de Sheshan. Et il est vrai qu'avec la pandémie, le sanctuaire a été fermé pendant deux ans, de sorte qu'en 2021 il ne pouvait pas faire partie des sanctuaires qui composaient le marathon de prière contre la pandémie proclamé par le pape François en mai - et pendant que le sanctuaire était fermé, le parc d'attractions voisin venait de rouvrir.
Les propos du pape François s'inscrivent toutefois dans un contexte plus large : les négociations en vue du renouvellement de l'accord entre le Saint-Siège et la Chine sur la nomination des évêques, qui expire en octobre 2022, et l'arrestation surprise du cardinal Joseph Zen, évêque émérite de Hong Kong, qui a été conduit en prison le 11 mai et n'a été libéré sous caution que par la suite.
Le Regina Coeli du 22 mai
La salutation du pape François à la fin du Regina Coeli du 22 mai était pleine de signes. Le Pape a tout d'abord renouvelé aux catholiques de Chine "l'assurance de ma proximité spirituelle : je suis avec attention et participation la vie souvent complexe et les vicissitudes des fidèles et des pasteurs, et je prie pour eux chaque jour".
C'est précisément en ces termes qu'a été évoquée l'affaire du cardinal Zen, qui sera jugé le 19 septembre. Le Pape avait alors invité à s'unir dans la prière "afin que l'Eglise en Chine, dans la liberté et la tranquillité, puisse vivre en communion effective avec l'Eglise universelle et exercer sa mission d'annoncer l'Evangile à tous, offrant ainsi également une contribution positive au progrès spirituel et matériel de la société".
La deuxième partie, en fait, demandait une plus grande liberté pour l'Église, et une plus grande liberté religieuse. Le pouvoir de la diplomatie, celui de dire les choses sans les dire et surtout sans déformer l'interlocuteur chinois.
L'équilibre diplomatique
Le fait est que le Vatican ne tient pas pour acquis que l'accord sera renouvelé. Le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d'État du Vatican, a déclaré dans une interview qu'il espérait pouvoir modifier une partie de l'accord. Et l'archevêque Paul Richard Gallagher, le "ministre des affaires étrangères" du Vatican, rencontrant les ambassadeurs de l'UE lors d'un déjeuner à huis clos, aurait déclaré que si la Chine souhaitait un accord plus permanent, peut-être permanent, le Saint-Siège dirait non.
D'autre part, le fait que le Saint-Siège ait voulu donner un poids relatif à l'accord est indiqué par un détail : l'accord a été signé le 22 septembre 2018, le premier jour du voyage du pape François dans les pays baltes.
Comme on le sait, le Secrétaire d'État et le Secrétaire d'État aux relations avec les États suivent le Pape dans ses déplacements. En choisissant cette date, il était nécessaire pour le Saint-Siège de signer l'accord avec son homologue, Wang Chao, vice-ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine, alors Monseigneur Antoine Camilleri.
Si les dates comptent, il semble clair que ce jour a été choisi parce qu'il aurait été inévitable d'avoir une délégation plus réduite, avec un accord signé par les n° 3 et non par les n° 1.
L'accord a ensuite été renouvelé en octobre 2020, et a jusqu'à présent donné deux résultats : tous les évêques de Chine sont considérés comme étant en communion avec Rome, et seuls six évêques en quatre ans ont été nommés dans le cadre de l'accord.
Les termes de l'accord sont inconnus, bien qu'il y ait des spéculations selon lesquelles le Saint-Siège s'engagera avec le gouvernement dans un processus d'examen des candidats à l'épiscopat jusqu'à ce que le pape nomme un évêque qui soit également acceptable pour Pékin. Toutefois, l'accord préserverait la pleine autonomie du pape dans le choix des évêques.
Il est certain que la relation entre le Saint-Siège et la Chine est un équilibre instable, et l'arrestation soudaine du cardinal Zen en est la preuve. Après l'arrestation, le Saint-Siège a fait savoir qu'il suivait de près l'évolution de la situation.
Il n'y a donc pas eu de protestation officielle, également parce que, la Chine étant l'un des rares pays au monde à ne pas avoir de relations diplomatiques avec le Saint-Siège, il n'existait pas de canaux appropriés pour une plainte officielle.
Le Cardinal, cependant, semblait un peu égoïste. Défenseur de la démocratie à Hong Kong, qui s'était toujours fermement opposé à l'accord, le cardinal Zen est allé jusqu'à tenter d'empêcher le renouvellement en se rendant à Rome et en essayant d'être reçu par le pape. Mais il a eu un succès relatif. Il n'a rencontré que brièvement le cardinal Pietro Parolin, le secrétaire d'État du Vatican. C'était le signal définitif que le Pape ne s'arrêterait pas pour écouter la raison au sujet de l'accord. Le dernier d'une série de signaux.
Signaux à la Chine
Plus tôt, en octobre 2019, le pape François avait envoyé un télégramme à Hong Kong alors qu'il survolait son territoire en se rendant au Japon. Sur le vol de retour, il avait minimisé l'importance du télégramme, disant qu'il s'agissait d'un télégramme de courtoisie envoyé à tous les États. Ces déclarations sont en partie trompeuses, car Hong Kong n'est pas un État, mais elle est appréciée par Pékin, au point que le ministre des affaires étrangères Geng Shuang avait souligné que de la part du pape, "la Chine apprécie l'amitié et la gentillesse".
Et pas seulement ça. Lors de son itinéraire au Japon, le pape François avait survolé la Chine et Taïwan. Dans le télégramme envoyé à Pékin, il salue la Chine en tant que "nation", tandis que les salutations à Taipei sont adressées au "peuple de Taïwan", même si la nonciature de Taipei est significativement appelée la nonciature de la Chine.
En juillet 2020, le pape François avait également décidé d'omettre de ses paroles à la fin de l'Angélus un appel pour Hong Kong, à un moment délicat du renouvellement de l'accord.
Il s'agit là de signaux clairs adressés à la Chine, ce qu'il a apprécié.
Aujourd'hui, le pape François s'efforce de ne pas fâcher le "dragon rouge", mais les négociations en vue d'un nouvel accord semblent plus difficiles que jamais. La Chine souhaiterait une plus grande implication du Vatican, et pourrait même mettre sur la table la possibilité d'un représentant non résident du Saint-Siège. Le monde catholique appelle à plus de prudence, dans une situation que le gouvernement ne facilite de toute façon pas.
L'arrestation du cardinal Zen s'est avérée être un prétexte, une façon de montrer ses muscles. L'accusation, en fin de compte, ne porte pas sur l'ingérence étrangère, mais sur le fait de ne pas avoir enregistré correctement un fonds humanitaire dont le cardinal et cinq autres membres du monde démocratique étaient les dépositaires.
Peu, après tout, mais assez pour envoyer un message à l'Église : tout est sous contrôle.
Pour le Saint-Siège, cependant, il vaut la peine de poursuivre le dialogue. "Nous sommes conscients que nous nous serrons la main et que la lame du couteau peut nous faire saigner, mais il est nécessaire de parler à tout le monde", explique un Monseigneur qui a participé aux négociations par le passé.
En fin de compte, l'accord semble toujours une possibilité à envisager. Après tout, selon un vieux dicton diplomatique du Vatican, "les accords sont conclus avec des personnes qui ne sont pas dignes de confiance".