Le pape François est arrivé vers 15 heures à la cathédrale syro-catholique, où il a été accueilli par des fidèles réunis autour de l'église sous les applaudissements, manifestant une grande affection et une grande joie. La rencontre avec les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses, les séminaristes et les catéchistes aura lieu dans la cathédrale.
La cathédrale Notre-Dame-du-Salut est le siège de l'archiéparchie syro-catholique de Bagdad et a été la cible de deux attaques terroristes. L'un d'eux, en octobre 2010, a été particulièrement grave, perpétré par l'autoproclamé État islamique, où 48 personnes ont été tuées, dont deux prêtres.
Affection et gratitude
Après les salutations du patriarche Ignace Youssef III Younan d'Antioche des Syriens et du cardinal Louis Raphaël Sako, patriarche de Babylone des Chaldéens, président de l'Assemblée des évêques catholiques d'Irak, le pape a commencé son discours.
Le Saint-Père a commencé son discours en exprimant son affection pour l'ensemble de la communauté irakienne. "Je vous embrasse tous avec une affection paternelle. Je remercie le Seigneur qui, dans sa providence, nous a permis cette rencontre aujourd'hui. Je remercie Sa Béatitude le Patriarche Ignace Youssif Younan et Sa Béatitude le Cardinal Louis Sako pour leurs mots de bienvenue.
Le souvenir de ceux qui ont été victimes des attentats n'a pas manqué, puisque le pape a fait une mention spéciale de ces lieux " bénis par le sang de nos frères et sœurs qui ont payé ici le prix extrême de leur fidélité au Seigneur et à son Église ". Que le souvenir de leur sacrifice nous inspire à renouveler notre confiance dans la puissance de la Croix et son message salvateur de pardon, de réconciliation et de résurrection. Le chrétien est en effet appelé à témoigner de l'amour du Christ partout et en tout temps. C'est l'Évangile à proclamer et à incarner aussi dans ce pays bien-aimé. En tant qu'évêques et prêtres, religieux et religieuses, catéchistes et responsables laïcs, vous partagez tous les joies et les souffrances, les espoirs et les angoisses des fidèles du Christ".
Ne pas réduire le zèle apostolique
La pandémie a aggravé "les besoins du peuple de Dieu et les défis pastoraux ardus auxquels il est confronté". Malgré tout, poursuit François, ce qui ne doit jamais être arrêté ou réduit, c'est notre zèle apostolique, que vous puisez dans des racines très anciennes, dans la présence ininterrompue de l'Église sur ces terres depuis les temps les plus reculés".
Face au virus du découragement qui semble nous entourer, a-t-il dit, nous ne devons pas le laisser nous infecter. "Le Seigneur nous a donné un vaccin efficace contre ce terrible virus, qui est l'espoir né de la prière persévérante et de la fidélité quotidienne à notre apostolat. Avec ce vaccin, nous pouvons avancer avec une énergie toujours nouvelle, pour partager la joie de l'Évangile, en tant que disciples missionnaires et signes vivants de la présence du Royaume de Dieu, un Royaume de sainteté, de justice et de paix".
"Combien le monde qui nous entoure a besoin d'entendre ce message. N'oublions jamais que le Christ est proclamé avant tout par le témoignage de vies transformées par la joie de l'Évangile. Comme nous le voyons dans l'histoire ancienne de l'Église dans ces pays, une foi vivante en Jésus est "contagieuse", elle peut changer le monde. Evangelii gaudium, 167)".
L'unité dans la douleur
Le Saint-Père s'est associé à la douleur et à la souffrance des Irakiens ces derniers temps. "Au cours des dernières décennies, vous et vos concitoyens avez dû faire face aux conséquences de la guerre et des persécutions, à la fragilité des infrastructures de base et à la lutte permanente pour la sécurité économique et personnelle, ce qui a souvent conduit à des déplacements internes et à la migration de nombreuses personnes, y compris des chrétiens, vers d'autres parties du monde. Je vous remercie, frères évêques et prêtres, de rester proches de votre peuple, de le soutenir, de vous efforcer de répondre à ses besoins et d'aider chacun à jouer son rôle au service du bien commun.
Il les a également encouragés à poursuivre avec soin les activités éducatives et caritatives "de leurs Églises particulières, qui représentent une ressource précieuse pour la vie de la communauté ecclésiale et de la société dans son ensemble". Je les encourage à persévérer dans cet engagement, afin que la communauté catholique en Irak, bien que petite comme une graine de moutarde (cf. Mt 13,31-32), continuent d'enrichir le parcours de tout le pays".
Diversité et unité
Naturellement, le Pape a également appelé à la fraternité : "L'amour du Christ nous demande de mettre de côté tout égocentrisme et toute rivalité ; il nous pousse à la communion universelle et nous appelle à former une communauté de frères et de sœurs qui s'accueillent et s'occupent les uns des autres (cf. Lettre encyclique, p. 4). Fratelli tutti, 95-96). Je pense à l'image familière d'un tapis. Les différentes Églises présentes en Irak, chacune avec son patrimoine historique, liturgique et spirituel ancestral, sont comme autant de fils de couleurs particulières qui, tissés ensemble, constituent un tapis unique et magnifique, qui non seulement témoigne de notre fraternité, mais renvoie aussi à sa source. Car Dieu lui-même est l'artiste qui a conçu ce tapis, qui le tisse avec patience et le raccommode avec soin, voulant que nous soyons toujours étroitement unis entre nous, comme ses fils et ses filles".
François a encouragé, en rappelant les paroles de Saint Ignace d'Antioche : "Qu'il n'y ait rien en vous qui puisse vous diviser, [...] mais que, rassemblés en commun, il y ait une seule prière, une seule espérance dans la charité et dans la sainte joie" (Ad Magnesios, 6-7: PL 5, 667). Combien est important ce témoignage d'unité fraternelle dans un monde souvent fragmenté et déchiré par nos divisions. Tout effort pour construire des ponts entre la communauté et les institutions ecclésiales, paroissiales et diocésaines sera un geste prophétique de l'Église en Irak et une réponse fructueuse à la prière de Jésus pour que tous soient un (cf. Jn 17,21; Ecclesia au Moyen-Orient, 37).
Les paroles adressées aux pasteurs et aux fidèles, aux prêtres, aux religieux et aux catéchistes soulignent que les tensions qui surgissent "sont des nœuds que nous portons en nous ; en effet, nous sommes tous pécheurs. Mais ces nœuds peuvent être dénoués par la grâce, par un amour plus grand ; ils peuvent être desserrés par le pardon et le dialogue fraternel, en portant patiemment les fardeaux des uns et des autres (cf. Gal 6,2) et se renforcer mutuellement dans les épreuves et les difficultés".
Accompagnons les bergers
Il a ensuite souhaité s'adresser à ses " frères évêques en particulier ". J'aime penser à notre ministère épiscopal en termes de proximité, c'est-à-dire notre besoin de rester avec Dieu dans la prière, avec les fidèles confiés à nos soins et avec nos prêtres. Soyez particulièrement proche de vos prêtres. Ne les voyez pas comme des administrateurs ou des directeurs, mais comme des pères, soucieux du bien de leurs enfants, prêts à leur offrir soutien et encouragement à cœur ouvert. Accompagnez-les par votre prière, par votre temps, par votre patience, en valorisant leur travail et en encourageant leur croissance. Ainsi, vous serez pour vos prêtres un signe visible de Jésus, le Bon Pasteur qui connaît ses brebis et donne sa vie pour elles (cf. Jn 10,14-15)".
Puis, se tournant vers toutes les personnes présentes, le Pape les a encouragées à annoncer l'Évangile avec courage : "Vous avez tous entendu la voix du Seigneur dans votre cœur, et comme le jeune Samuel, vous avez répondu : "Me voici" (1 S 3,4). Que cette réponse, que je vous invite à renouveler chaque jour, conduise chacun de vous à partager la Bonne Nouvelle avec enthousiasme et courage, en vivant et en marchant toujours à la lumière de la Parole de Dieu, que nous avons le don et la tâche de proclamer. Nous savons que notre service comporte également une partie administrative, mais cela ne signifie pas que nous devons passer tout notre temps en réunion ou derrière un bureau. Il est important que nous soyons au milieu de notre troupeau et que nous offrions notre présence et notre accompagnement aux fidèles dans les villes et les villages. Je pense à ceux qui risquent d'être laissés pour compte, les jeunes, les personnes âgées, les malades et les pauvres.
La lignée du peuple de Dieu
Lorsque nous servons notre prochain avec dévouement, a souligné François, comme vous le faites, avec un esprit de compassion, d'humilité et de bonté, avec amour, nous servons vraiment Jésus, comme il nous l'a dit lui-même (cf. Mt 25,40). Et en servant Jésus dans les autres, nous découvrons la vraie joie. Ne te détourne pas du peuple saint de Dieu, dans lequel tu es né. N'oubliez pas vos mères et vos grands-mères qui vous ont "nourri" dans la foi, comme dirait saint Paul (cf. 2 Tm 1,5). Soyez des pasteurs, des serviteurs du peuple et non des administrateurs publics. Toujours avec le peuple de Dieu, jamais séparés comme si vous étiez une classe privilégiée. Ne reniez pas cette noble "souche" qu'est le peuple saint de Dieu".
Le Saint-Père n'a pas voulu terminer sans mentionner "nos frères et sœurs qui sont morts dans l'attaque terroriste de cette cathédrale il y a dix ans et dont la béatification est en cours". Leur mort rappelle avec force que l'incitation à la guerre, les attitudes de haine, la violence et l'effusion de sang sont incompatibles avec les enseignements religieux (cf. la lettre encyclique "La mort de nos frères et sœurs"). Fratelli tutti, 285). Et je voudrais également me souvenir de toutes les victimes de violence et de persécution, appartenant à n'importe quelle communauté religieuse.
Engagement à construire la paix
Demain, leur a annoncé François, à Ur, je rencontrerai les chefs des traditions religieuses présentes dans ce pays, pour proclamer à nouveau notre conviction que la religion doit servir la cause de la paix et de l'unité entre tous les enfants de Dieu. Ce soir, je veux vous remercier pour votre engagement à être des artisans de paix, au sein de vos communautés et avec les croyants d'autres traditions religieuses, en répandant des graines de réconciliation et de coexistence fraternelle qui peuvent conduire à une renaissance de l'espoir pour tous. Je pense en particulier aux jeunes.
"Partout, ils sont porteurs de promesses et d'espoir, surtout dans ce pays. En effet, il y a ici non seulement un patrimoine archéologique inestimable, mais une richesse incalculable pour l'avenir : ce sont les jeunes ! Ils sont votre trésor et nous devons en prendre soin, en nourrissant leurs rêves, en les accompagnant sur le chemin et en renforçant leur espoir. Bien qu'ils soient jeunes, leur patience a certainement déjà été mise à rude épreuve par les conflits de ces dernières années. Mais n'oublions pas qu'ils sont, avec les personnes âgées, la pointe du diamant du pays, les meilleurs fruits de l'arbre. C'est à nous de les éduquer pour le bien et de leur donner de l'espoir.
Fidèle aux promesses de Dieu
Le pape a conclu en rappelant que "par le baptême et la confirmation, par l'ordination ou la profession religieuse, vous avez été consacrés au Seigneur et envoyés pour être des disciples missionnaires sur cette terre si étroitement liée à l'histoire du salut. En témoignant fidèlement des promesses de Dieu, qui ne manquent jamais de se réaliser, et en cherchant à construire un nouvel avenir, vous faites partie de cette histoire. Que votre témoignage, mûri dans l'adversité et fortifié par le sang des martyrs, soit une lumière éclatante en Irak et au-delà, pour proclamer la grandeur du Seigneur et faire que l'esprit de ce peuple exulte en Dieu notre Sauveur (cf. Lc 1,46-47)".