Tous les saints et les pécheurs 

Le saint n'est pas celui qui ne tombe pas, mais celui qui garde l'espoir de la victoire finale malgré ses échecs partiels et se relève pour la prochaine bataille.

1er novembre 2023-Temps de lecture : 4 minutes

En ce jour de la Toussaint, nous nous souvenons de tous ceux qui sont déjà au ciel : les saints de l'autel et les saints inconnus ou "saints de la porte d'à côté", comme les appelle le pape. Parler de leurs vertus n'est pas nouveau, mais pourquoi ne pas parler de leurs péchés ? 

J'ai souvent dit que l'un des moteurs de ma vie de foi est l'appel que saint Jean-Paul II nous a lancé, à nous les jeunes de l'époque, lors de la rencontre européenne de Saint-Jacques-de-Compostelle en 1989. "N'ayez pas peur d'être des saints", nous a-t-il dit, et il est resté si calme.

Mais comment pouvons-nous être saints ? -ont demandé les milliers d'entre nous qui l'ont entendue et qui ont compris que la sainteté était réservée à des personnes spéciales, que Dieu marquait de stigmates et à qui il donnait la capacité de léviter.

Nous avons alors commencé à comprendre que vouloir être saint n'avait rien à voir avec la chanson d'Alaska et de Parálisis Permanente, qui mettait en évidence les aspects les plus gothiques de ce que la tradition nous a transmis, mais qu'il s'agissait du projet de vie de ceux qui ont connu Jésus et son message et qui veulent suivre son chemin de vérité et de liberté pour être transformés en lui.

Dès les premiers siècles, la communauté chrétienne a gardé précieusement la mémoire de ceux qui ont témoigné de cette foi. Un témoignage qui, comme le rappelle l'apôtre Jacques, est avant tout fait d'œuvres. Des œuvres telles que celles mises en œuvre par les martyrs, confessant la foi jusqu'à la mort, les premiers missionnaires, portant la Parole de Dieu jusqu'aux confins de la terre, les serviteurs des pauvres, donnant leur vie pour les nécessiteux, et ainsi de suite.

Au début, lorsque les communautés chrétiennes étaient petites, les saints étaient connus de tous. C'étaient des gens "de ma paroisse". On visitait leurs tombes et on gardait en mémoire tout ce qu'ils avaient fait. Ils étaient vénérés parce que, malgré leurs fautes, que tout le monde connaissait, la grâce avait été plus forte. Ce n'est plus eux qui agissent, mais le Christ qui vit en eux. Mais peu à peu, les témoignages de première main se sont perdus et les récits de la vie des saints sont devenus des légendes auxquelles on a ajouté des anecdotes extraordinaires dans le but légitime d'exalter leurs figures.

Ne nous voilons pas la face, tout parent ou grand-mère qui se respecte a embelli littérairement une histoire de famille pour que les enfants soient fiers de faire partie du clan. Oui, vous aussi.

Et cela, qui se produit dans les meilleures familles, s'est aussi un peu produit dans l'histoire de la grande famille ecclésiale, au point que de nombreux textes de la vie des saints sont aussi crédibles que les aventures de n'importe quel super-héros de Marvel. 

Peut-être qu'à une autre époque, dans une société habituée aux mythes, des histoires extraordinaires seraient valables ; mais dans une société incrédule comme la nôtre, ce dont les gens ont besoin, ce sont de vraies histoires. Et l'histoire réelle de tout chrétien, l'histoire réelle de tout saint, est pleine de lumières et d'ombres, de moments de foi claire et de sombre rébellion, de chutes, d'erreurs, de faiblesses, d'humanité !

Parler des péchés des saints, loin de scandaliser les hommes et les femmes d'aujourd'hui, les rapproche, les rend réels et donc, et surtout, imitables. Car un saint parfait est une invention parfaite, parce qu'elle ne serait pas compatible avec la condition humaine.

Et je ne parle pas des saints qui, comme saint Paul, sainte Pélagie ou saint Augustin, ont eu une vie de péché public avant leur conversion, je parle des saints qui, tout au long de leur vie de foi, ont dû lutter contre leur orgueil, leur cupidité, leur colère, leur gourmandise, leur luxure, leur envie ou leur paresse.

Combien me manquent les chapitres de la vie des saints où sont expliquées ces luttes de ceux qui ont voulu se laisser aider par la grâce, mais qui ont souvent été vaincus par leur nature fragile ! Le saint n'est pas celui qui ne tombe pas, mais celui qui garde espoir en la victoire finale malgré ses échecs partiels et se relève pour le prochain combat.

À quoi servent les récits de combats physiques contre le diable dans de nombreuses hagiographies, s'ils ne me disent pas d'abord comment ils ont fait face à ses suggestions subtiles, à ses tentations quotidiennes, à ses tromperies de tous les jours, les mêmes que celles dont nous souffrons tous ?

Certes, de nombreux saints racontent leurs obscurités dans leurs autobiographies, mais leurs disciples et leurs enfants spirituels tentent de les dissimuler, rendant leurs récits peu crédibles. Que de dégâts le puritanisme a fait et continue de faire ! La rigidité génère de la frustration chez ceux qui la pratiquent, car elle transforme la vie chrétienne en un "jeu d'enfant". liste de contrôle impossible à achever ; et elle provoque le scandale chez ceux qui la contemplent, car tôt ou tard le sépulcre blanchi finit par dégager sa puanteur. 

Que les saints soient saints, qu'ils soient divinement humains, qu'ils soient des vases de terre contenant un trésor, qu'ils montrent que là où le péché a abondé, la grâce a abondé bien davantage, qu'ils se glorifient volontiers de leurs faiblesses car c'est quand ils sont faibles qu'ils sont forts, qu'ils nous montrent que nous ne devons pas avoir peur d'être des saints car le Seigneur n'est pas venu sanctifier les justes mais les pécheurs ; qu'ils nous montrent qu'il ne faut pas avoir peur d'être des saints, car le Seigneur n'est pas venu sanctifier les justes mais les pécheurs ; qu'ils montrent leurs vertus héroïques, mais en mettant en premier lieu celle de l'humilité. Bonne fête de la Toussaint et des pécheurs !

L'auteurAntonio Moreno

Journaliste. Diplômé en sciences de la communication et licencié en sciences religieuses. Il travaille dans la délégation diocésaine des médias à Malaga. Ses nombreux "fils" sur Twitter sur la foi et la vie quotidienne sont très populaires.

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