Mais que voient mes yeux !

Bethléem est le reflet des réalités ultimes, elle nous montre l'amour inépuisable de Dieu qui comble tous nos désirs et, en même temps, le cœur fermé d'Hérode qui vit un véritable enfer.

15 décembre 2023-Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Détail de la "Légende de Saint François". Giotto

Si je ne le vois pas, je n'y crois pas. Avec cette phrase, le matérialisme qui nous entoure écarte toute référence à la transcendance. Et s'il était possible de voir Dieu avec nos yeux ? Saint François d'Assise l'a envisagé et y est parvenu.

Dans la première biographie écrite du saint, Thomas de Celano raconte qu'en 1223, alors qu'il se trouvait près de la ville italienne de Greccio, il demanda à un certain Jean, un noble de bonne réputation, de préparer une crèche pour Noël afin qu'il puisse contempler la scène de la Nativité. Il lui dit : "Je veux célébrer la mémoire de l'enfant qui est né à Bethléem et je veux contempler en quelque sorte de mes yeux ce qu'il a souffert dans son handicap d'enfant, comment il a été couché dans la mangeoire et comment il a été placé sur le foin entre le bœuf et l'âne".

Le chroniqueur décrit comment, en cette nuit de Noël, la première crèche de l'histoire a rassemblé une multitude de frères et de familles des environs, venus avec des bougies et des feux allumés, et la joie avec laquelle le saint l'a contemplée et a prêché l'eucharistie qu'un prêtre a célébrée sur la crèche elle-même. Au milieu des chants de louange de la communauté improvisée, l'une des personnes présentes a eu une vision extraordinaire. On dit qu'il a vu "un enfant sans vie couché dans la mangeoire" et que, lorsque François s'est approché de lui, il s'est réveillé de son sommeil. Cette vision n'est pas sans signification, explique l'auteur, puisque l'enfant Jésus, enfoui dans l'oubli de nombreux cœurs, est ressuscité par sa grâce, par l'intermédiaire de son serviteur François, et son image est gravée dans le cœur des amoureux. À la fin de la veillée solennelle, tous sont rentrés chez eux remplis de joie".

À l'occasion du 800e anniversaire de cet événement unique, la coutume de reconstituer la naissance de Jésus afin que les enfants et les adultes puissent contempler "avec leurs yeux" le mystère de Bethléem est toujours très vivante.

Il y a des crèches monumentales et miniatures, vivantes et en céramique, populaires et napolitaines, statiques ou mécanisées ?

Dans chaque maison, dans chaque établissement, dans chaque paroisse, institution ou confrérie, il y a un "Jean", comme le premier fabricant de crèches de Greccio, qui, seul ou avec un groupe de collaborateurs, s'efforce chaque année de réaliser la meilleure crèche possible.

Dans la lettre apostolique "Le beau signe de la crèche Sur le sens et la valeur de la crèche, que je recommande à tous de relire en cette période de l'année, le Saint-Père a rappelé que "la façon dont la crèche est préparée n'est pas importante, elle peut toujours être la même ou être modifiée chaque année ; ce qui compte, c'est qu'elle parle à notre vie". Et il est vrai que les crèches parlent. Elles nous parlent de la présence quotidienne de Dieu au milieu de nos vies ordinaires, même si nous vivons souvent loin de Lui. Leur valeur en tant que ressource pour la transmission et le renouvellement de la foi est incontestable.

L'autre jour, j'essayais de répondre aux doutes d'un de mes enfants sur ce que serait le paradis. Et il est vraiment difficile d'imaginer cette "contemplation de Dieu" dont parle le Catéchisme. "Quel ennui de voir Dieu toute la journée ! -me dit l'enfant. Cherchant une réponse, j'ai regardé la crèche déjà installée dans le salon, et j'ai remarqué la joie de la Vierge Marie, de saint Joseph, des anges, des petits bergers, des rois... Ils étaient tous pleins de joie en contemplant l'enfant Dieu.

Imaginez que vous êtes à Bethléem, que vous dormez à la belle étoile, et que soudain un chœur d'anges apparaît et vous annonce que l'enfant Jésus est né : iriez-vous le voir ou non parce que vous trouvez cela ennuyeux ? 

-Ce serait extraordinaire. J'irais courir", a-t-il répondu.

-Imaginez le paradis comme ça. Un lieu où, chaque jour, tu peux assister à un événement extraordinaire qui te remplit de joie. Un lieu où les rois et les pauvres partagent le même destin et le même désir : être près de Dieu, le plus près possible et le plus longtemps possible, parce que s'ennuyer... Vous vous ennuyez en regardant un bébé, votre cousin par exemple ?

-Non, elle est si drôle, je pourrais jouer avec elle pendant des heures.

-Parce qu'un vieil homme amer ne penserait pas à créer l'Univers pour partager sa vie avec toi !

Au fur et à mesure que nous avancions, la conversation m'a fait comprendre encore plus profondément combien Bethléem est un reflet des réalités ultimes, car elle nous montre aussi l'enfer d'Hérode, décrépit et triste parce qu'il n'a pas voulu accepter la bonne nouvelle qui lui était annoncée. Tout en haut de son château, il n'a que lui et sa cruauté, loin de la communion avec Dieu et les hommes.

Ainsi, une fois de plus, saint François a récidivé. Cet enfant endormi dans un sommeil très profond s'est levé grâce à lui pour m'apporter, 800 ans plus tard, un nouvel enseignement, une nouvelle espérance. Et ce, simplement en contemplant quelques figurines d'argile. Voir, c'est croire.

L'auteurAntonio Moreno

Journaliste. Diplômé en sciences de la communication et licencié en sciences religieuses. Il travaille dans la délégation diocésaine des médias à Malaga. Ses nombreux "fils" sur Twitter sur la foi et la vie quotidienne sont très populaires.

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