La grandeur du gris

Le gris possède sa propre beauté et sa propre richesse, avec une capacité unique à compléter et à rehausser les autres couleurs. Ma nostalgie du ciel bleu de l'été m'avait fait oublier la splendeur subtile du gris.

31 janvier 2025-Temps de lecture : 3 minutes
la grandeur du gris

L'été est l'une des saisons les plus appréciées en Europe. Son charme est célébré depuis des siècles, et il suffit de lire les sonnets de Shakespeare pour voir comment il glorifie sa beauté. Personnellement, j'aime aussi l'été, surtout le bleu éclatant du ciel. C'est une teinte profonde et vibrante, que je préfère qualifier de "beau bleu".

Quittant l'Europe pour l'été, j'ai dit adieu au ciel bleu profond pour retourner sous les tropiques pour la saison des pluies. À mon arrivée, j'ai été accueillie par un ciel nuageux, dominé par des nuages gris. J'avais l'impression que la nature ne me souriait pas, qu'elle avait conspiré pour me priver de ma joie et de mon espoir, remplaçant le bleu vif par un gris sombre. J'avais échangé le "beau bleu" contre un "gris terne". Les jours passèrent et le préjugé à l'égard du temps gris commença à affecter mon humeur. J'ai commencé à percevoir le ciel gris comme dépourvu de beauté, croyant qu'il me condamnerait à une série de jours ternes et sans vie.

Dans cet état d'esprit, il tombait peu à peu dans ce qu'il G.K. Chesterton qualifie d'"hérésie" le fait de qualifier un jour gris d'"incolore". Il prétend le contraire, affirmant que le gris est en fait une couleur, une couleur puissante et agréable. Si le bleu est beau, le gris l'est aussi. Si le bleu est vibrant, le gris est tout aussi riche. Alors pourquoi assimiler le gris à l'absence de vie ? Le gris possède sa propre beauté et sa propre richesse, ainsi qu'une capacité unique à compléter et à rehausser d'autres couleurs. Ma nostalgie du ciel bleu de l'été m'avait fait oublier la splendeur subtile du gris.

Arrêtons-nous un instant sur la grande capacité de changement et d'adaptation que possède la couleur grise. La force réside dans la diversité, et le gris en a beaucoup. Réfléchissons aux nombreuses nuances de gris ; quelqu'un a dit un jour qu'il y en avait cinquante, mais je ne suis pas d'accord. Il pourrait s'agir de quarante-neuf ou de cinquante et une, cela m'est égal. Ce qui compte, c'est l'incroyable diversité de ses expressions. Certains jours, les nuages gris brillent comme de l'argent ; d'autres jours, ils évoquent l'éclat de l'acier, la douceur du plumage d'une colombe ou la beauté pâle des cendres, un rappel de ce moment solennel qu'est la nuit des temps. Mercredi des Cendres.

Par moments, les nuages deviennent denses et lourds, ressemblant à la machinerie d'une usine sidérurgique. Ils retiennent la pluie à l'intérieur et la libèrent sous forme de délicats ruisseaux qui tombent sur les toits et dans les rues, transformant le ciel gris en un grand fabricant de tubes d'acier, de longs tubes d'eau. C'est ainsi que le ciel gris se transforme en une grande fabrique de tubes d'acier, de longs tubes d'eau. "Ciel, fais tomber la pluie, d'en haut", pourrions-nous nous exclamer, émerveillés par leur générosité. Rorate Caeli !

Le ciel gris n'est pas seulement beau en soi, il est aussi le catalyseur d'autres couleurs. Ils sont généreux, ils rendent les autres couleurs plus vives. Lorsque les pluies arrivent, elles peignent la terre de verts plus vifs et de rouges plus profonds ; nous avons des feuillages plus verts et de la boue plus rouge.

Faut-il encore douter des beautés du gris ? Non seulement il permet aux autres couleurs de s'épanouir, mais il sait aussi les combiner et les mélanger. Je me demandais pourquoi mes élèves associaient des pantalons ou des jupes grises à des chemisiers roses ou à des chemises bleues, jusqu'à ce que je regarde le lever du soleil filtrer à travers les nuages gris.

Le jeu subtil du gris avec les roses et les oranges du lever ou du coucher du soleil reflète les choix de ces uniformes : l'influence de la nature dans ce qu'elle a de meilleur. De même, les taches de nuages gris dispersées dans un ciel bleu s'intègrent parfaitement. J'ai cessé de me poser cette question.

Allons-nous continuer à chanter la gloire du gris ? Les nuages gris agissent comme un grand parasol sur la terre, un parapluie qui atténue les rayons du soleil qui nous parviennent, rendant sa chaleur plus agréable, plus humaine.

Le gris, bien qu'il s'agisse d'une couleur distinctive, a un caractère intermédiaire. Le dictionnaire nous dira qu'il s'agit d'une couleur intermédiaire entre le noir et le blanc. Il semble toujours au bord de quelque chose, au seuil de l'évolution ; le voir, c'est être sur le point d'assister à un changement.

Chesterton capture magnifiquement cette essence, notant que le gris existe afin de "nous rappeler perpétuellement l'espoir indéfini qui est dans le doute lui-même ; et lorsque le temps est gris sur nos collines ou les cheveux gris sur nos têtes, nous pouvons encore nous rappeler le matin".

Le gris est en effet une couleur glorieuse. Et si quelqu'un a encore des doutes, considérez ceci : j'ai écrit cet essai avec un crayon de plomb, un outil aussi gris que les cieux que j'ai appris à admirer.

L'auteurVitus Ntube

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