Daurade et jambon

La pratique de l'abstinence, pour un chrétien en Carême, a pour centre l'abandon de la volonté plutôt que la simple matérialité de la chair.

19 février 2021-Temps de lecture : 2 minutes
Carême

L'arrivée du Carême amène avec elle la discussion conséquente sur la pratique chrétienne des mortifications. Surtout, peut-être à cause de sa répétition, l'abstinence.

Les arguments du "beau-frère" répétés dans les différents forums où l'on sait qu'il y a un catholique pratiquant reviendront : que c'est ringard, que c'est pire de manger un kilo d'huîtres qu'une cuisse de poulet, que c'est une absurdité ?

La vérité est que, comme dans de nombreuses discussions stériles, si, pour tenter d'expliquer la pratique de l'abstinence de viande certains jours, nous nous concentrons sur la "matérialité" du poulet, du canard ou de la daurade, nous passons à côté de l'essentiel.

La véritable pénitence n'est pas seulement l'acte d'échanger la dinde contre le fromage, mais l'abandon de sa volonté dans quelque chose d'aussi "insensé" que d'échanger la dinde contre le fromage.

Il serait très facile de trouver toutes sortes de raisonnements sur l'opportunité, ou non, d'un tel changement, alors que ce qui doit vraiment changer, c'est son propre cœur. Ne pas manger de viande, c'est ne pas nourrir ce moi omniscient qui réclame de gagner une bataille aussi triviale que celle de substituer un aliment à un autre.

L'abstinence nous met face à ce que nous "pouvons faire" mais ne faisons pas pour une cause plus grande : l'amour. Si notre pénitence est vide d'amour, si nous ne la vivons pas comme un acte d'amour - important, même si nous nous sommes "habitués" - alors nous commencerons sûrement à la juger comme une routine stupide à laquelle nous ne voyons aucun sens.

Comme dans toute relation amoureuse - après tout, c'est ce qu'est la vie chrétienne - le jeu se joue dans l'âme avec les expressions du corps.

C'est ainsi qu'il est indiqué par le CatéchismeLa pénitence intérieure du chrétien peut s'exprimer de différentes manières. L'Écriture et les Pères insistent surtout sur trois formes : le jeûne, la prière et l'aumône".

Le maintien de l'abstinence est donc une manifestation - tout simplement, d'ailleurs - d'amour. D'une certaine manière, nous nous souvenons d'un sacrifice infini par un geste simple dans sa forme. Cette année, alors que nous avons dû donner beaucoup sur la forme, la bataille se joue davantage sur le fond.

Probablement que ces jours de Carême est un bon moment pour mettre sur la table nos supériorités, nos opinions et nos volontés, même l'autosatisfaction de "ne pas manger de jambon" un vendredi de Carême.

Comme l'a dit le Pape au début de ce temps, "ce qui nous fait revenir à Lui, ce n'est pas de nous vanter de nos capacités et de nos mérites, mais d'accueillir sa grâce. La grâce nous sauve, le salut est pure grâce, pure gratuité".

Avec ces pénitences de Carême, avec l'abstinence en l'occurrence, nous nous unissons, en fin de compte, à la Passion du Christ en prenant une toute petite partie de la croix, si petite que, si nous y pensons, elle peut nous faire rougir un peu : ce n'est pas grand-chose que l'Église nous demande un vendredi de Carême ?

On pourrait dire que c'est bien moins que ce que le diététicien moyen nous demande pour chaque jour. Mais, comme dans la messe, le Christ prend nos petits renoncements et les relève. Comme je l'ai entendu dire un jour : "la route du paradis est pavée de petits pas".

L'auteurMaria José Atienza

Rédacteur en chef à Omnes. Diplômé en communication, avec plus de 15 ans d'expérience dans la communication ecclésiale. Elle a collaboré à des médias tels que COPE et RNE.

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