Espagne

"Limiter l'exercice du journalisme, c'est limiter l'exercice de la liberté".

Dans leur message à l'occasion de la Journée mondiale des communications, les évêques ont voulu se souvenir des reporters qui ont "donné leur vie" dans l'accomplissement de leur mission en rappelant qu'ils ont "donné leur vie pour notre liberté".

Maria José Atienza-11 mai 2021-Temps de lecture : 5 minutes
Journalistes

Photo : Jorge Maya / Unsplash

Les évêques espagnols membres de la Commission épiscopale pour les communications sociales ont rendu public leur message à l'occasion de la Journée mondiale des communications qui sera célébrée dans notre pays le 16 mai.

Dans leur message, les prélats ont exprimé leur gratitude pour le service des communicateurs "essentiel au développement des individus et des sociétés libres".

Un message dans lequel il ne veut pas oublier le service des professionnels de la communication morts dans l'exercice de ce service, en mémoire des journalistes David Beriáin et Roberto Fraile, assassinés il y a quelques jours dans l'exercice de leur profession.

La communication pour la dignité humaine

Dans le message, les évêques ont souligné la nécessité de "renouveler l'effort pour connaître la réalité de première main", dans ce sens, ils ont voulu souligner comment "dans la communication, rien ne peut remplacer complètement le fait de voir en personne. C'est pourquoi il est nécessaire de rendre visibles les nouvelles qui ont un visage, en particulier celles qui valorisent la dignité de la personne, comme les gestes de solidarité que nous avons vus au milieu de la dureté de cette crise sanitaire".

Le danger d'un "pointage du doigt politique

Des événements récents, tels que le ciblage de journalistes par certaines personnalités politiques en Espagne, ne sont pas passés inaperçus dans ce message. En effet, les évêques soulignent deux dangers pour la liberté d'information et l'accès à la vraie réalité des citoyens : d'une part, les " fausses nouvelles qui se répandent surtout sur les réseaux sociaux, ont voulu être contrées par une proclamation de vérités officielles de la part des institutions publiques " et, lié à cette " vérité construite " le " pointage des positions politiques des journalistes et des médias, ou l'interdiction de la couverture médiatique des actes politiques ". Dans cette ligne, dans leur message, les évêques rappellent que "limiter l'exercice du journalisme ou le signaler, c'est limiter et signaler l'exercice de la liberté".

Enfin, les prélats n'ont pas voulu oublier les difficultés rencontrées par les professionnels de la communication en raison du "rythme frénétique de l'actualité et de la mauvaise qualité de certaines sources d'information". Un danger contre lequel ils exhortent à "vérifier les sources, vérifier les informations, corriger les erreurs, rectifier les informations". Les évêques ont également voulu encourager tous les communicateurs, en ces temps difficiles, à poursuivre leur travail essentiel. Dans le même temps, nous invitons les entreprises de médias à placer l'accès à la vérité au-dessus de tout autre intérêt légitime, car leur première et grande responsabilité est envers la vérité et la société".

Texte intégral du message

L'effort pour trouver et dire la vérité

La Journée mondiale des communications, que nous célébrons chaque année le jour de l'Ascension du Seigneur, est un bon moment pour examiner le monde des communications du point de vue de l'époque dans laquelle nous vivons. Nous considérons ce service avec une profonde gratitude. La communication est essentielle au développement des individus et des sociétés libres. Comme le rappelle l'Évangile, nous croyons que sans vérité il n'y a pas de liberté (cf. Jn 8,32), et sans liberté il n'y a pas de coexistence digne. La communication nous aide à connaître la réalité et l'environnement dans lequel nous vivons, à former des critères sur les courants sociaux et culturels, à développer les dimensions récréatives et solidaires de la personne. Tout cela est nécessaire au développement vital d'un peuple.

De nombreuses personnes travaillent pour rendre ce service possible. Communicateurs, reporters, diffuseurs, techniciens, journalistes et tant d'autres professionnels de la communication donnent une bonne partie de leur temps avec professionnalisme et rigueur pour servir la société. Parfois, ce service trouve son origine dans une vocation personnelle, un appel reçu pour contribuer au bien commun. Parfois, nous constatons avec tristesse que la poursuite d'intérêts personnels sans rapport avec le bien commun a attaqué cette liberté par la violence verbale ou même physique. Certains journalistes, même récemment, ont donné leur vie en remplissant leur mission. Notre reconnaissance, nos remerciements et nos prières vont maintenant vers eux. Ils ont donné leur vie pour notre liberté.

Dans son message pour la Journée mondiale des communications, rendu public le jour de la fête de saint François de Sales, le pape François encourage les journalistes à renouveler leur engagement et leur enthousiasme pour leur profession. Avec la devise "Venez voirs" (Jn 1,46). Communiquez en rencontrant les gens là où ils sont et comme ils sont, le Pape nous encourage à "nous mettre en route, à aller voir, à être avec les gens, à les écouter, à capter les suggestions de la réalité, qui nous surprendra toujours dans tous ses aspects".

C'est précisément en ce moment, au milieu des difficultés que la pandémie de Covid-19 nous a apportées à tous, qu'il est nécessaire que les journalistes renouvellent leurs efforts pour connaître la réalité de première main. Nous demandons de ne pas tomber dans la tentation d'un journalisme de salle de rédaction, de bureau et d'ordinateur, un journalisme sans sortie dans la rue, sans rencontre personnelle avec l'actualité et ses protagonistes. En matière de communication, rien ne peut remplacer complètement le fait de voir en personne. C'est pourquoi il est nécessaire de rendre visibles les nouvelles qui ont un visage, en particulier celles qui mettent en évidence la dignité de la personne, comme les gestes de solidarité que nous avons vus au milieu de la dureté de cette crise sanitaire. Certaines valeurs ne peuvent être apprises que par le témoignage de ceux qui les vivent, raconté par les médias.

Nous sommes conscients que ce service à la société est assailli par de multiples dangers. Le chaos provoqué par les fake news, notamment sur les médias sociaux, a été contré par la proclamation de vérités officielles par les institutions publiques. En réalité, cette idée augmente les risques contre la vérité et offre un scénario assez proche de celui décrit dans certains romans dystopiques à l'actualité troublante. Le ciblage politique des journalistes et des médias, ou l'interdiction de la couverture médiatique d'événements politiques, ne constituent pas un risque moindre pour la liberté. Restreindre l'exercice du journalisme ou le montrer du doigt, c'est restreindre et montrer du doigt l'exercice de la liberté.

Un autre risque pour la profession est le rythme frénétique de l'actualité et la mauvaise qualité de certaines sources d'information, qui peuvent porter atteinte aux principes essentiels de la profession. Cependant, même en ces temps difficiles, il est nécessaire, peut-être plus que jamais, de vérifier les sources, de contrôler les informations, de corriger les erreurs et de rectifier les informations.

On peut affirmer avec conviction que la vérité implique un grand effort pour la trouver et un plus grand effort pour l'offrir. Mais, comme le dit le pape François, nous ne pouvons pas perdre de vue que le travail du journaliste est "utile et précieux seulement s'il nous pousse à aller voir la réalité que nous ne connaîtrions pas autrement, s'il met en réseau des connaissances qui ne circuleraient pas autrement, s'il permet des rencontres qui n'auraient pas lieu autrement". Par leur travail, les professionnels de la communication doivent être des générateurs d'espaces de rencontre avec la vérité des personnes et des événements.

Pour toutes ces raisons, nous, les évêques membres de cette Commission pour les communications sociales, souhaitons encourager tous les communicateurs en ces temps difficiles pour l'exercice d'un travail essentiel. Dans le même temps, nous invitons les entreprises de presse à placer l'accès à la vérité au-dessus de tout autre intérêt légitime, car leur première et grande responsabilité est envers la vérité et la société. Enfin, tous ceux d'entre nous qui bénéficient de ce travail sont également coresponsables de la vérité, notamment dans l'environnement des réseaux sociaux et dans la diffusion de nouvelles véridiques qui contribuent à améliorer notre société.

Que la Vierge Marie, mère de Jésus-Christ, que nous connaissons comme la Vérité, aide tous les professionnels dans l'exercice d'une mission digne et honnête pour le bien de la société.

José Manuel Lorca, évêque de Cartagena et président de la CECS

Mgr Salvador Giménez, évêque de Lleida

Mgr José Ignacio Munilla, évêque de Saint-Sébastien

Mgr Sebastià Taltavull, évêque de Majorque

Antonio Gómez Cantero, évêque coadjuteur d'Almeria

Mgr Francisco José Prieto, évêque auxiliaire de Saint-Jacques-de-Compostelle

Mgr Joan Piris, évêque émérite de Lleida

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