Javier Martínez-Brocal est un vaticaniste chevronné qui a suivi de près le pontificat de François. En tant que journaliste, il a consacré une grande partie de sa carrière à des reportages sur le Vatican et l'Église catholique. Il a été directeur de Rapports de Romeest l'une des principales agences de presse sur le pape et le Saint-Siège, et son travail a contribué à apporter des informations religieuses au public avec une approche claire et accessible.
Dans cet entretien, M. Martínez-Brocal donne à Omnes son point de vue sur le rôle du journalisme au Saint-Siège et sur l'évolution de la communication au sein du Vatican dans un monde de plus en plus interconnecté.
D'après votre expérience de correspondant au Vatican, quelles sont les principales différences dans la communication du pape François par rapport à ses prédécesseurs ?
J'ai l'impression que François a voulu montrer que le pape n'est pas une autorité lointaine. L'un des fils conducteurs du pontificat est la proximité, y compris dans la communication. Il a donné des dizaines d'interviews.
Le Pape a opté pour une relation plus directe avec les journalistes, sans s'appuyer autant sur la Salle de presse. Quel est l'impact de cette évolution sur la couverture médiatique du Vatican ?
Du point de vue du dicastère pour la communication, j'imagine que ce n'était pas très facile, car le pape se fiait beaucoup à son instinct et ne demandait pratiquement jamais conseil au dicastère pour la communication en ce qui concerne ses relations avec la presse. Avec les médias, l'impact a été énorme. C'est une façon de dire qu'il ne craignait pas de répondre à des questions directes, qu'il n'avait pas peur de rendre compte de ses décisions.
Comment ce nouveau modèle de communication a-t-il modifié la manière dont les médias interprètent et transmettent les messages du pape ?
La proximité du Pape est déjà un message très fort, et permet de partir sur une base positive. Cette volonté de dialogue est perçue par les médias comme une ouverture et permet d'aborder des questions complexes et négatives de manière constructive.
À l'ère des médias sociaux et de l'accès immédiat à l'information, quels défis et quelles opportunités ce style plus spontané et plus accessible de François présente-t-il ?
La rapidité avec laquelle les réseaux sociaux ont reproduit les déclarations décontextualisées du Pape a conduit à des malentendus et à des incompréhensions. Je pense que cela a parfois empoisonné la perception de François, mais à moyen terme, cela a profité aux médias spécialisés, car cela a suscité une plus grande curiosité, et une plus grande demande de compréhension des codes qu'il utilise.
Lors de ses voyages apostoliques, François fait souvent des déclarations dans l'avion qui font la une des journaux internationaux. Ces conférences de presse ont-elles aidé à comprendre le pape ou ont-elles donné lieu à des interprétations ambiguës ?
Ces conférences de presse ont eu plus d'avantages que d'inconvénients, elles ont été très utiles. Elles lui ont permis de s'expliquer, elles ont montré que l'Église a une attitude constructive. Et je crois me souvenir que lorsqu'il a commis des erreurs ou utilisé des expressions imagées, il s'est toujours excusé.
Les voyages de François ont donné la priorité aux périphéries géographiques et existentielles, comme l'Irak ou le Sud-Soudan. Que retiendriez-vous de vos impressions sur ses voyages ?
Je retiens son intérêt pour aller là où personne ne voulait aller, pour mettre en lumière des pays et des situations qui passent inaperçus dans le jeu des intérêts mondiaux : l'Albanie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, Timor oriental... J'ai été touchée par cette douceur.
Pensez-vous que les voyages de François ont redéfini la diplomatie du Vatican et son rôle dans les conflits internationaux ?
Je ne sais pas... Je pense qu'ils ont aidé à mieux comprendre les priorités du pape en tant que chef religieux, qui étaient différentes de celles qu'il aurait eues s'il avait été un simple dirigeant politique.
Francisco a écrit plus de 40 livres Ce niveau de production a-t-il rendu votre voix plus influente ?
Il convient de distinguer les compilations de ses homélies et de ses discours qui ont été publiées comme ses propres livres de celles qu'il a effectivement poursuivies comme projet d'édition, qui sont peu nombreuses. Ces derniers sont généralement de grande valeur et ont été bien accueillis.
Pensez-vous que le Pape a été trop exposé dans les médias ?
Sur la scène internationale, il est sans doute l'une des voix les plus intéressantes et les plus indépendantes et peut-être celle qui a le plus contribué à enrayer les crises qui nous accablent aujourd'hui. Certains auraient préféré qu'il parle moins, peut-être parce qu'ils lui en voulaient.