Traduction de l'article en anglais
Depuis 2011, sur décision de l'Assemblée générale des Nations unies, le 21 mars est la Journée mondiale de la trisomie 21. En France, cette date revêt un caractère particulier car c'est l'éminent généticien français Jérôme Lejeune qui, à l'âge d'une trentaine d'années, a découvert l'origine de ce syndrome et a consacré sa vie à la recherche et, surtout, à la prise en charge des personnes atteintes de trisomie 21. Par la nature même de sa découverte, le célèbre scientifique était conscient qu'en faisant avancer la science, il mettait en même temps en danger la vie de ces personnes laissées à la merci du drame de l'avortement : aujourd'hui en France, plus de 90% des grossesses diagnostiquées avec ce syndrome se terminent par une fausse couche. Lejeune est décédé en 1994, mais son héritage perdure à travers la Fondation et l'Institut qui portent son nom et cette journée mondiale où nous sommes invités à porter des chaussettes dépareillées (en raison de leur similitude avec les chromosomes) (afin de promouvoir la différence).
Récemment, plusieurs initiatives ont montré à l'opinion publique française l'importance de l'inclusion et de la diversité des personnes présentant différents types de handicaps et plus particulièrement la trisomie 21. Des films tels que "Hors normes", "Apprendre à t'aimer" et "De Gaulle" ont porté ces questions sur grand écran. La première montre l'héroïsme des responsables de différentes associations d'inclusion sociale. Le second raconte l'histoire transformatrice d'une jeune famille française dont la fille est atteinte du syndrome de Down. Enfin, le film "De Gaulle" (de Gabriel Le Bomin) donne un rôle prépondérant à la fille du célèbre général et homme politique français : Anne, née avec une trisomie et décédée alors qu'elle n'avait que 20 ans, occupait une place très spéciale dans le cœur de Charles de Gaulle, étant sa force, sa joie et son inspiration dans les innombrables batailles que le fondateur de la Cinquième République française a dû affronter.
Dans le domaine de l'entrepreneuriat social, certaines villes européennes ont vu l'ouverture de "Cafés Joyeux" dans leurs quartiers centraux. Ce projet de l'entrepreneur Yann Bucaille-Lanrezac, qui a reçu il y a quelques jours le prix de l'entrepreneur social du Boston Consulting Group (BCG), emploie des personnes handicapées dans des cafés typiquement français. Le plus célèbre d'entre eux est situé à quelques mètres de l'Arc de Triomphe, sur la même avenue des Champs-Élysées, et a été inauguré par le président français, Emmanuel Macron, en compagnie de sa ministre en charge des personnes handicapées, Sophie Cluzel. Mme Cluzel n'a pas été choisie pour rien pour ce poste sensible : elle est la mère de la jeune Julie (née en 1995) atteinte de trisomie 21 et a consacré la majeure partie de sa vie professionnelle à l'intégration de ces personnes.
Au Café Joyeux, sur la "plus belle avenue du monde", nous avons rencontré une autre voix pour l'inclusion des enfants atteints de trisomie 21 : l'artiste française Cilou. Il y a un an, le 21 mars 2021, une date très symbolique pour les porteurs de trois chromosomes 21, l'artiste de 27 ans a apposé son nom sur une affiche à son nom. musique et chorégraphie à la biographie d'un enfant, Louis, depuis le moment où il est dans le ventre de sa mère jusqu'à ce qu'il commence à travailler dans un café Joyeux. Notre conversation est constamment animée par la musique, l'ambiance et les danses des employés qui y travaillent. La présence du jeune artiste n'est pas étrangère à l'enthousiasme qui s'installe rapidement ce soir dans les locaux des Champs Elysées. Notre dialogue sera joyeusement "interrompu" à plusieurs reprises par deux jeunes professionnels attentifs du café.
Comment vous est venue l'idée de composer une chanson et une vidéo sur ce sujet ?
-Pendant la période d'enfermement, je voulais écrire une chanson sur la joie. Comme nous le savons tous par expérience, ces mois ont été très durs et difficiles. J'essaie de faire en sorte que mes chansons véhiculent des valeurs sur la vie de personnes réelles. L'idée de la trisomie 21 est venue lorsque l'année 2021 a commencé, ce qui m'a fait penser aux personnes qui ont trois chromosomes 21. Dans notre société actuelle, et c'est quelque chose que je trouve très positif, la différence, la diversité, est constamment célébrée, car nous sommes tous différents.
Or, nous avons souvent tendance à nous égaliser, à gommer les différences, à ne pas être nous-mêmes pour ressembler aux autres ou pour nous adapter à ce que nous pensons que la société nous impose. L'authenticité, la différence et la joie des personnes trisomiques nous poussent à être nous-mêmes face à eux qui sont complètement eux-mêmes, sans jouer aucun rôle, sans se cacher derrière aucun masque. Ils ont une joie naturelle et contagieuse, c'est quelque chose que tout le monde reconnaît en eux. Ma chanson parle en quelque sorte de cette joie d'exister, de vivre, d'être différent : vive la différence !
Qui est Luis le garçon dans ta chanson ?
-Lorsque j'ai eu l'idée d'écrire cette chanson sur le handicap, j'ai commencé à chercher sur Instagram des histoires de familles ayant des enfants atteints de trisomie 21. Je ne voulais pas que ma chanson soit quelque chose de théorique, je voulais vraiment que ce soit quelque chose de vrai, incarné dans une histoire réelle. Dans mon entourage proche, je ne connaissais pas d'enfants atteints de ce handicap. C'est comme ça que j'ai trouvé le compte Louis le super hérosCette famille de Bretagne (ouest de la France) y raconte la vie de ce petit Louis. J'ai beaucoup aimé, je les ai contactés et ils ont accepté mon idée avec beaucoup d'enthousiasme. Louis a maintenant 5 ans et demi. Dans la chanson, je me mets à sa place et je parle à la première personne : quand j'étais dans le ventre de ma mère, je rêvais de ma vie, et j'avais un secret bien gardé. Au moment de la naissance, je décris l'étonnement de mes parents, ce que vivent beaucoup de familles dans ces cas-là. Et la strophe principale parle de joie, que je suis joyeux, que je ne veux pas déranger personne, seulement que je suis différent et que je veux être aimé.
Elle dit que son secret est son chromosome supplémentaire, qui est son "super pouvoir" pour rendre le monde plus beau. Il parle aussi de sa famille, de son grand frère, de ses parents, et des difficultés, mais aussi des joies, qui peuvent surgir, mais qui finalement se rendent toutes à son immense cœur et à son affection. Il parle également de la beauté de la fragilité et de l'éloignement de la conformité. Et il dit aussi que lorsqu'il sera grand, ses parents se préoccuperont de son autonomie et de son intégration. A ce stade, nous montrons un jeune homme qui va travailler dans un café Joyeux (dans la ville de Rennes, en Bretagne), où il n'y a pas de peur ou de préjugés, seulement la fierté d'être différent et compétent. La chanson se termine sur les idées qui me semblent être les principales : je ne veux pas m'embêter, je veux juste aimer, la vie est une chance, vive la différence ! Dans la vidéo, on voit les gens de sa famille et de son entourage, même le maire de la ville.
D'où vient votre vocation artistique et votre engagement pour cette cause ?
Dès mon plus jeune âge, j'ai fréquenté le conservatoire : la musique et l'art ont toujours été présents dans ma vie. J'ai étudié l'administration des affaires. À la fin de mes études, j'ai effectué un voyage humanitaire en Indonésie où j'ai enseigné la guitare à des jeunes en situation de risque social. Nous avons créé une chanson et une vidéo avec leur histoire et plusieurs autres qui ont été très populaires. De retour en France, j'ai commencé à travailler dans le marketing pour un grand groupe français. J'ai beaucoup aimé, mais j'ai senti que je pouvais combiner toutes mes compétences et mon désir d'avoir un impact dans quelque chose de plus artistique : c'est ainsi que Cilou est née ! Mes chansons et mes vidéos portent généralement sur des thèmes existentiels, profonds, basés sur l'expérience de personnes traversant des moments difficiles comme la perte d'une mère, des doutes sur leur place dans le monde, des rencontres, etc.
Les voyages humanitaires sont transformateurs car ils vous aident à voir le monde d'un autre œil. Dans mon cas, les personnes handicapées mentales ont toujours été présentes dans ma vie car mes parents nous emmenaient une fois par mois pour jouer et s'occuper de ces personnes dans le cadre d'une association. Lorsque j'étais étudiant dans le nord de la France, j'ai participé à une initiative qui organisait des pièces de théâtre et des comédies musicales pour les jeunes handicapés.
Quoi qu'il en soit, je pense que l'intégration et le respect de ces personnes sont une bataille très importante et positive. Mais c'est quelque chose de général, pour le bien commun, parce que nous sommes tous différents, nous avons tous nos fragilités, et nous voulons tous le respect et une place dans le monde.