L'enseignant de l'école Université internationale de Catalogne et collaborateur de OmnesMontserrat Gas Aixendri a été l'un des orateurs du XXXIIe cours de remise à niveau en droit canonique organisé par l'Institut de droit canonique de l'Union européenne. École de droit canonique de l'université de Navarre sous le titre Droit canonique du mariage et procédure régulière"..
Mme Gas, experte en accompagnement des familles, a centré son intervention sur "La validité du mariage et le manque de foi", un thème toujours d'actualité dans notre société, dont Omnes a voulu débattre avec le professeur Gas.
Vous évoquez le défi que représente aujourd'hui l'augmentation des mariages entre personnes baptisées mais non croyantes. Quels sont, selon vous, les principaux défis pastoraux auxquels l'Eglise est confrontée dans ces situations et comment les relever efficacement ?
-D'une manière générale, dans tout l'Occident chrétien, le phénomène de la sécularisation est une réalité qui touche tout le monde. En ce qui concerne la mariage Le mariage chrétien signifie inévitablement que beaucoup de ceux qui demandent à se marier dans l'Église le font pour des raisons de coutume ou de tradition, plutôt que par conviction personnelle. Cependant, cela ne signifie pas qu'ils ne veulent pas se marier ou qu'ils n'acceptent pas le mariage chrétien. C'est pourquoi le grand défi de la pastorale familiale est de l'accompagnement des jeunes qui souhaitent fonder une famille.
La préparation à ce moment important de la vie doit être une priorité pour les pasteurs. Le pape François a insisté sur ce point à plusieurs reprises, suggérant la réalisation d'un authentique catéchuménat pour aider à la maturation de ceux qui souhaitent se marier. Les fruits de cette démarche sont les suivants Itinéraires catéchuménaux pour la vie chrétienne publié par le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie en 2019. Ce document devrait inspirer les Églises particulières à améliorer ce processus de préparation. Cette préparation devrait être orientée vers une compréhension approfondie de la signification de l'amour conjugal.
Le fait que le mariage ait été élevé au rang de sacrement ne modifie pas la substance du mariage initial (ou mariage naturel), mais lui ajoute une signification et une dimension surnaturelles.
Montserrat Gaz Aixendri
Il aborde notamment la notion d'"objet du consentement" dans le mariage sacramentel. Comment considère-t-il qu'un manque de foi puisse influencer la compréhension du mariage chrétien ? Ce manque de foi peut-il affecter la validité du mariage ?
-Tout d'abord, je voudrais souligner que se marier n'est pas un acte d'adhésion aveugle aux modèles présentés par la culture dominante. Le mariage est avant tout une décision d'amour inconditionnel, fidèle et fécond entre une femme et un homme. Comme l'a dit le théologien Carlo Caffarra, les preuves originelles de la famille sont inscrites dans la nature de la personne humaine, car la vérité du mariage est inscrite dans le cœur des gens.
Toutefois, ceux qui vivent dans un contexte sécularisé et ne connaissent pas le message chrétien peuvent être influencés par ce que le pape François appelle une "vision mondaine du mariage", dans laquelle le mariage est perçu comme une forme de gratification affective qui peut être constituée de n'importe quelle manière et modifiée lorsque l'être aimé ne répond plus à leurs attentes (François, Discours à la Rote romaine 23 janvier 2015). Toutefois, les liens entre les situations de manque de foi et la nullité du mariage ne sont pas automatiques : ils doivent être analysés au cas par cas, en établissant que l'un des éléments essentiels du mariage naturel a été rejeté.
En ce qui concerne le rôle de la foi dans la validité du mariage, vous soulignez qu'aucun acte de foi explicite n'est requis de la part des parties contractantes. Comment l'Église interprète-t-elle le concept d'"intention de faire ce que fait l'Église" dans ces cas, en particulier dans les mariages entre personnes ayant des degrés de foi différents ou entre personnes ayant abandonné la foi ?
-La doctrine sur les sacrements indique comme condition nécessaire à l'administration valide des sacrements, l'intention de faire ce que l'Église fait. Dans le cas du mariage, "ce que fait l'Église" est le mariage naturel lui-même, c'est-à-dire le don inconditionnel et fécond entre un homme et une femme. Le fait que le mariage ait été élevé au rang de sacrement ne change pas la substance du mariage initial (ou mariage naturel), mais lui ajoute un sens et une dimension surnaturels.
Sans aucun doute, ceux qui ont la foi ont plus de ressources surnaturelles pour aimer inconditionnellement et pour vivre un mariage fidèle et fructueux ; mais cela n'implique pas que ceux qui ne sont pas croyants ne sont pas capables de se donner en mariage à une autre personne. Le mariage est une réalité créée par Dieu pour tous les hommes, quelles que soient leurs croyances. C'est pourquoi le mariage n'est pas une question de foi, mais d'amour conjugal.
Malgré ce que nous avons souligné dans la question précédente, l'absence de foi peut influencer la validité du mariage par l'exclusion de la dimension surnaturelle du mariage. Comment interpréter cette " influence " de l'absence de foi sur la validité du mariage et quel rôle joue dans ce processus la justesse de l'intention des parties contractantes ?
-Comme je l'ai dit, le sacrement ne change pas les éléments essentiels du mariage voulu par Dieu (un, indissoluble, fécond). Le fait de rejeter le sacrement (le sens surnaturel) n'influe pas sur la validité du mariage tant que la volonté d'un don de soi réellement matrimonial entre les époux reste intacte. Il est possible que quelqu'un rejette le sacré et veuille s'unir inconditionnellement et fructueusement à la personne qu'il aime.
D'après mon expérience, le manque de foi conduit souvent à une situation d'ignorance de la sacramentalité du mariage, et donc à une attitude psychologique d'indifférence plutôt que de rejet du surnaturel.
Cependant, si cette déviation de la foi devait conduire les partenaires à rejeter le mariage lui-même, tel qu'il a été institué par Dieu, il s'agirait alors d'une union nulle et non avenue.
Nous devrions passer d'une pastorale de services (ponctuels) à une pastorale d'accompagnement des personnes dans l'ensemble de leur parcours de vie chrétienne.
Montserrat Gaz Aixendri
Dans le même ordre d'idées, quelles conséquences cette perspective peut-elle avoir sur la pratique pastorale et l'interprétation des cas de nullité de mariage dans l'Église ?
-La préparation à la célébration du mariage est, comme je l'ai dit, un moment essentiel pour assurer un mariage non seulement valide mais aussi fécond. Cependant, il est important de distinguer ces deux niveaux. Dans le cas de personnes éloignées de la foi, la préparation au mariage exige d'abord d'assurer la validité. Il est important de faire ressortir les véritables intentions des contractants afin qu'ils puissent être acceptés pour la célébration d'un vrai mariage.
En même temps, il devrait y avoir une cohérence entre les dispositions requises pour l'admission au mariage et celles prises en compte lors de l'examen d'une éventuelle nullité. On pourrait avoir la fausse impression que la porte d'accès au mariage dans l'Église est trop large et que les critères selon lesquels la validité est ensuite jugée sont trop étroits.
Vous faites allusion à la nécessité d'une bonne préparation au mariage, en particulier dans le cas de couples éloignés de la foi. Comment conciliez-vous la nécessité de préparer les couples à un mariage valide avec l'importance de favoriser une compréhension plus profonde de la sacramentalité du mariage dans le cadre de la pastorale de la famille ?
-Les personnes engagées dans la pastorale de la préparation au mariage ne doivent pas seulement se préoccuper d'assurer la validité du mariage, mais aussi d'aider le couple à découvrir la grandeur du don sacramentel. La prise de conscience du caractère vocationnel - humain et chrétien - du mariage ouvre de nouveaux horizons en mettant en évidence que le don sacramentel est destiné à la sanctification personnelle et relationnelle de la famille chrétienne, en montrant la beauté du mariage vécu selon la dignité baptismale.
À mon avis, ce qui nous manque peut-être, ce sont des structures pastorales qui soient vraiment capables d'accompagner ces fiancés. Nous devrions pouvoir les accompagner dans la préparation et, surtout, tout au long de leur vie de couple.
Nous devrions passer d'une pastorale de services (ponctuels) à une pastorale d'accompagnement des personnes dans l'ensemble de leur parcours de vie chrétienne. C'est l'un des défis qui devrait le plus interpeller les personnes impliquées dans la pastorale familiale.