Ces dernières années, la présence de femmes à des postes de responsabilité au sein de l'Église est devenue normale. Si, dans la structure du Saint-Siège, la présence des femmes dépasse à peine 23 % dans les postes de gouvernement, ce pourcentage augmente notablement au niveau diocésain. Une praxis nécessaire pour que, dans les limites de sa propre nature, l'Église réponde, dans ses institutions et ses postes de gouvernement, à la réalité de l'action des femmes aujourd'hui.
Dans votre livre, vous évoquez des événements historiques qui ont consolidé les problèmes d'autonomie des femmes dans l'Église. Ces problèmes sont-ils toujours présents dans l'Église ?
-Eh bien, pas seulement par la négative. Dans l'histoire de l'Église, il y a eu des femmes - surtout au Moyen-Âge - qui ont joui d'un pouvoir énorme. Je pense à l'abbesse du monastère de Las Huelgas (Burgos), qui avait un pouvoir quasi épiscopal. Le pape lui-même soutenait son autonomie vis-à-vis des évêques et des nonces. Il est vrai aussi que nous avons l'exemple inverse.
Dans le domaine de la vie contemplative, nous avons aujourd'hui le problème de l'âge, et ce depuis longtemps. Il y a des monastères avec un très petit nombre de nonnes et d'un âge avancé, qui font face à d'énormes défis en termes de santé, de solitude, de défis économiques.
Le pape François a vu la solution dans les confédérations de monastères, en les unissant. Cela a été dénoncé par certains comme une ingérence de l'autorité et par d'autres comme l'exact contraire. Il est vrai que le fait pour une moniale âgée de quitter le monastère dans lequel elle souhaite mourir a des connotations dramatiques. En même temps, on ne peut pas les laisser seules... C'est peut-être un problème presque similaire à celui que beaucoup de familles rencontrent avec leurs aînés. C'est facile à dire, mais ce n'est pas une question qui peut être facilement résolue.
Au cours des dernières décennies, le monde a connu un processus de changement dans le rôle des femmes et des termes tels que l'autonomisation ou la libération ont été mis en avant. Sont-ils applicables dans l'Église ?
-Ces termes sont souvent utilisés : autonomisation, libération, émancipation. Mais leur signification a de nombreuses connotations et tout le monde ne les comprend pas de la même manière. Les idéologies, si caractéristiques de notre époque, ont eu un impact considérable sur ces mots, modifiant ou transformant leur sens.
D'un autre côté, je pense qu'il est remarquable que les femmes d'aujourd'hui occupent une place très différente de celle de nos grands-mères dans la société. De nombreuses femmes ont dû travailler et prendre des risques considérables pour parvenir à ce changement, et nous devrions leur en être reconnaissants. Mais, en même temps, bien que l'introduction de changements sociaux puisse nécessiter, au début, une certaine force, je pense que c'est une erreur de voir la "libération des femmes" en termes de violence ou de concurrence avec les hommes.
Le monde a besoin de paix, y compris dans ce domaine. Le christianisme en particulier est une religion de paix. C'est pourquoi je ne pense pas qu'il soit juste que certains groupes génèrent de la violence ou de la désunion dans l'Église sous le prétexte d'une plus grande valorisation des femmes. Nous devons continuer à travailler, bien sûr, mais dans l'harmonie et la paix chrétienne.
Comment le droit canonique soutient-il non seulement la possibilité mais aussi la nécessité de la participation des femmes à la gouvernance de l'Église ?
-En réalité, le droit canonique ne dit rien sur la nécessité d'avoir des femmes au gouvernement. C'est plutôt la pratique du gouvernement qui doit commencer à les inclure. Cela exige que l'autorité ecclésiastique découvre la grande valeur de l'apport des femmes dans la prise de décision.
En matière juridique, la limite pour les femmes dans le gouvernement ecclésiastique est celle de tout laïc. Y a-t-il encore du cléricalisme dans ce domaine du gouvernement ecclésiastique ?
-Il y a quelques années, le pape François a modifié l'exigence du Code de droit canonique selon laquelle il faut être un homme pour recevoir les ministères laïcs d'acolyte et de lecteur. Avec ce changement, on peut dire que, dans la législation universelle de l'Église, il n'y a pas de différence entre un laïc de sexe masculin et un laïc de sexe féminin.
Vous parlez d'un processus d'approfondissement de l'anthropologie et d'un développement de l'anthropologie dans l'égalité et la coresponsabilité. Y a-t-il un risque de perdre cette base au profit d'un "droit d'avoir des droits" tel qu'il existe au niveau civil ?
-Il semble parfois que certaines personnes privilégient le contrôle des choses plutôt que la justice et la vérité. Pourtant, même si cela peut sembler risqué, c'est la seule voie possible. Dans la société civile occidentale, le problème n'est pas l'égalité ou la justice, mais la négation de l'existence de la vérité. Ce problème est bien reflété dans le dernier document du Dicastère pour la doctrine de la foi, Dignitas infinita.
Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'une institution hiérarchique. Jusqu'où le sacrement de l'ordre étend-il le pouvoir du sacrement et où s'ouvre le champ des laïcs ?
-L'organisation hiérarchique est propre à l'Eglise ; elle ne peut y renoncer sans perdre son identité. Les prêtres y sont nécessaires, mais les laïcs aussi. Et en même temps, ce n'est pas le travail que nous faisons qui nous donne de la dignité, mais le fait que nous sommes enfants de Dieu, et c'est la base de l'égalité de tous les fidèles. Nous devrions être plus conscients du fait que dans l'Église, il n'y a pas de fidèles de première ou de deuxième classe, nous avons tous le même statut. De plus, le travail du prêtre a besoin du travail des laïcs et vice versa. Il ne s'agit pas de sphères isolées ou opposées, mais complémentaires.