Amérique latine

L'objection de conscience reconnue en Uruguay

Les tribunaux uruguayens ont créé un précédent en annulant une loi restreignant le droit des médecins à l'objection de conscience en matière d'avortement.

Agustín Sapriza-13 avril 2016-Temps de lecture : 3 minutes
Le Parlement de l'Uruguay.

Le Tribunal des litiges administratifs (TCA) de l'Uruguay a rendu un arrêt qui fera date pour l'État de droit. Elle a établi des lignes directrices et des concepts qui garantissent le libre exercice de l'objection de conscience par les professionnels de la santé. De cette manière, le droit à l'objection de conscience, implicitement établi dans la Constitution uruguayenne, est protégé. Ce droit est expressément inclus, bien que dans des conditions très spécifiques, dans le texte de loi qui permet actuellement la dépénalisation de l'avortement. En Uruguay, pendant des années, le parti au pouvoir (Broad Front) tente de faire passer une loi dépénalisant l'avortement. Lors de sa précédente présidence (du 1er mars 2005 au 1er mars 2010), l'actuel président uruguayen, Tabaré Vázquez (réélu le 1er mars 2015), a opposé son veto à une loi qui avait été adoptée par le Parlement, fondée sur la réalité scientifique selon laquelle, dès la conception, une vie humaine existe.

Enfin, en 2012, sous la présidence de José Mújica, la nouvelle loi a été adoptée. Cette loi présente comme une exception la possibilité de ne pas criminaliser la réalisation d'un avortement. C'est ce que stipule clairement l'article 2 de la loi : "L'interruption volontaire de grossesse ne sera pas pénalisée et, par conséquent, les articles 325 et 325bis du Code pénal ne seront pas applicables si la femme remplit les conditions établies dans les articles suivants et si elle est pratiquée pendant les douze premières semaines de grossesse. 

Par conséquent, il est actuellement possible de pratiquer des avortements sans être pénalisé uniquement lorsqu'ils sont effectués conformément à la procédure et aux garanties expressément prévues par la loi et dans les douze premières semaines de la grossesse.

En outre, le droit du médecin d'exercer son objection de conscience a été expressément inclus dans l'article 11 de la loi. Il n'y a donc aucune conséquence négative pour le médecin objecteur de conscience d'exercer un droit que la loi elle-même lui garantit.

Un mois après l'adoption de la loi, le ministère de la santé publique a publié le décret qui la réglemente. Ce décret contredisait les spécificités de la loi à bien des égards. Dans son essence, elle a illégitimement limité et restreint le droit à l'objection de conscience des médecins qui ne voulaient pas participer à la procédure d'avortement.

Un groupe de médecins, qui estimaient que le décret violait la relation médecin-patient et leurs droits fondamentaux à exercer leur profession dans le respect de leur conscience, ont engagé une procédure judiciaire pour faire valoir leurs droits.

Ainsi, en août 2015, le TCA a mis fin à une situation d'illégalité manifeste et de manque de certitude générée par le ministère de la Santé publique au cours de la dernière période de gouvernement. L'arrêt ATT a établi des lignes directrices et des concepts qui garantissent le libre exercice de l'objection de conscience pour les professionnels de la santé, comme le prévoient la Constitution et la loi.

Il s'agit d'une résolution historique car, en plus de confirmer la protection de la liberté de conscience, elle approuve l'existence de mécanismes permettant d'ajuster, par le biais de la justice, les excès du pouvoir exécutif face à une loi approuvée par le Parlement.

La discordance entre le ministère de la santé publique et la loi approuvée concernant la portée de l'objection de conscience était évidente. Pour cette raison, le ministère a voulu modifier le texte de la loi par voie réglementaire, commettant ainsi une illégalité manifeste qui a conduit le TCA à abroger la loi avec effet général et absolu. En d'autres termes, elle a effacé les articles contestés du système juridique dès son origine, affectant ainsi non seulement les médecins plaignants, mais tous les médecins.

L'arrêt reconnaît que le droit à l'objection de conscience découle des droits fondamentaux de l'individu, tant en ce qui concerne le droit à la liberté de conscience que le droit à la dignité humaine. Les juges ont confirmé les points centraux de la plainte.

Cependant, pendant toute la période où l'arrêt de la Cour soutenant la position des médecins opposants est arrivé, il y a eu beaucoup de pression de la part de certaines autorités du Ministère de la Santé Publique. Les médecins ont été qualifiés de faux objecteurs ou de manquement à leurs devoirs dans le système de santé. Des tentatives ont également été faites pour donner une vision restrictive du droit à l'objection de conscience, en l'opposant au droit supposé des femmes d'avorter. Les médias en ont tellement parlé que dans plusieurs départements et villes du pays, tous les gynécologues qui y exercent sont désormais des objecteurs de conscience. Par conséquent, les avortements ne peuvent y être pratiqués que si les autorités envoient des médecins disposés à les pratiquer.

À une époque où la société veut approuver à tout prix les prétendus droits de certains groupes sociaux, le système juridique soutient ceux qui, en conscience, pensent autrement et voient leur liberté bafouée, et sur la base de droits véritables, montre que personne ne peut exiger qu'ils renoncent à la lumière intérieure de leur conscience.

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